Ceux qui voient partout la manipulation ne manqueront pas de s'interroger sur l'étrange coïncidence entre la divulgation de l'information judiciaire sur le divorce et le fameux «jeudi noir» où Nicolas Sarkozy devait affronter sa première épreuve sociale. Maintenant que la presse française, (le Nouvel observateur, LCI, Libération) , s'appuyant sur des sources judiciaires, affirment que les Sarkozy ont officialisé leur procédure de divorce, la question qui accapare les esprits, outre celle de l'endosser publiquement, tourne autour de la manière que choisira Nicolas Sarkozy pour expliquer aux Français cette situation inédite. Après un long silence qui, mesuré au temps politique, ressemble à une éternité, Nicolas Sarkozy va devoir le rompre par souci pédagogique et obligation institutionnelle. Choisira-t-il d'intervenir dans un journal télévisé comme il l'a fait déjà en mai 2005 sur France 3, les tremolos dans la voix, la posture humble pour expliquer sa séparation avec Cecilia : «La vérité, elle est très simple. Comme des millions de familles, la mienne a connu des difficultés. Ces difficultés nous sommes en train de les surmonter». Optera-t-il pour une formule d'interview dans un journal populaire pour expliquer patiemment les tenants et les aboutissants de ses démêlés sentimentaux avec la première dame de France et surtout décrire les conséquences politiques et institutionnelles d'un tel divorce? Ceux qui l'ont récemment entendu évoquer les affres de la solitude, même celle qui concerne les pauvres et les exclus, à l'occasion de la 20ème Journée mondiale du refus de la misère, ont pu mesurer la blessure interne que cet écorché vif couvait : «Il y a sans doute une bonne solitude, celle de la réflexion, celle qui offre le silence la sérénité, la liberté (…) Mais il y a la solitude poisseuse, celle qui oppresse, celle qui naît de la privation de l'écoute, du soutien, du regard de l'autre, celle qui fait oublier le sentiment d'aimer et d'être aimé». Par contre ceux qui gardent la tête froide et la lucidité à toute épreuve, ceux qui voient partout la manipulation et l'abus du calendrier ne manqueront pas de s'interroger sur l'étrange coïncidence entre la divulgation d'information judiciaire sur la procédure du divorce et le fameux «jeudi noir» où Nicolas Sarkozy devait affronter sa première épreuve sociale et croiser le fer avec les centrales syndicales autour des régimes spéciaux de retraite. Le jour même où de nombreux Français devaient crier leurs mécontentements et leur opposition aux choix gouvernementaux, les grands journaux parisiens n'avaient d'yeux que pour le destin du couple présidentiel. Le journal populaire «Le Parisien» choisit d'illustrer un grand article de sa Une intitulé «Rupture, l'heure de vérité pour Nicolas Sarkozy» par une série de photos du couple récapitulant des instants de bonheur des premières semaines de son mandat. Le journal «Libération» exhibe à sa Une une photo de Nicolas Sarkozy prise de dos, en face de Cecilia lors de sa dernière apparition officielle le 14 juillet dernier avec ce titre «Desperate Housewife », allusion à la célèbre série américaine préférée d'une autre première dame, Laura Bush. Les hebdo qui paraissaient jeudi n'étaient pas en reste. «L'Express» accorde généreusement sa couverture à ce drame présidentiel sous ce titre «L'affaire Cecilia» alors que le «Nouvel observateur» évoque «l'Octobre noir de Sarkoy». Malgré les nombreuses dénégations jugées sincères de Nicolas Sarkozy sur le ton «Cécilia et moi, c'est tout sauf une affaire politique», la collusion des calendriers a de quoi surprendre les plus délurés des observateurs. Et quelle que soit l'issue de cette affaire, une des plus pertinentes interrogations à laquelle sera soumis Nicolas Sarkozy lors de son prochain travail d'explication tournera autour de la réelle sincérité des retrouvailles à la veille des présidentielles. S'agissait-il d'un rabibochage conjoncturel destiné simplement à livrer la bataille des présidentielles ? Les communicateurs de l'Elysée savent que le simple soupçon de l'existence d'un deal pour bénéficier de la confiance des Français pout être mortel pour un président qui avait bâti toute sa fortune politique sur le parler vrai, sincère et direct. Dans son livre publié en juillet 2006 intitulé «Témoignage», Nicolas Sarkozy y allait d'une confession qu'il va falloir conjuguer sur tous les tons: «Aujourd'hui, Cécilia et moi nous sommes retrouvés pour de bon, pour de vrai, sans doute pour toujours».