Le département des pêches décide d'accorder à l'industrie de transformation de poisson des licences de pêche. Et ce, dans la limite de 50.000 tonnes. Les armateurs réagissent en appelant à une grève. Bien avant son application, le plan pélagique fait déjà des mécontents. L'accord de principe du ministère de l'Agriculture autorisant des industriels de la transformation de poisson d'affréter des chalutiers a suscité une levée de bouclier chez les pêcheurs côtiers. Une grève préventive de 48 heures a été décrétée, les 26 et 27 juillet, par la Confédération nationale de la pêche côtière au Maroc (CNPCM). «C'est du lobbying mal fondé. On ne fait pas une grève le jour où les conditions de la mer ne permettent pas d'habitude de sortir en mer», affirme Hassan Sentissi, président de la Fédération nationale des industries de transformation et de valorisation des produits de la pêche (FINEP). «Par ailleurs, précise M. Sentissi, ce n'est pas tout le secteur, mais une partie de la pêche côtière qui a suivi cet ordre d'arrêt de pêche». L'accord de principe donné par le département des pêches pour la délivrance d'autorisations d'affrètement de bateaux de pêche de petits pélagiques, au profit de propriétaires d'unités de conserve, partage la profession. Et ce, bien qu'il ne soit qu'une décision provisoire en attendant le décret d'application du plan pélagique. La mesure consiste concrètement en l'autorisation des industriels de procéder par leurs propres moyens à des captures dans une limite de 50.000 tonnes de sardines pour satisfaire leur demande en cette matière première. Et ce, aussi bien pour les unités de conserve que celle de la fabrication de farine de poisson. Cela d'autant que «les conserveries se trouvent actuellement dans une situation critique», explique M. Sentissi. «Même nos petits stocks sont épuisés, alors que tout ce que nous demandons c'est d'être approvisionnés en quantités suffisantes et en qualité acceptable», ajoute-t-il. Faux, rétorquent les responsables de la CNPCM. «Le secteur de la conserve ne connaît aucune crise», explique un communiqué de la Confédération. «Les quantités de poisson destinées aux unités de transformation ont connu une hausse remarquable d'année en année», précise-t-on auprès de la Confédération. «Elles sont passées de 66.000 tonnes en 1993 à 400.000 tonnes actuellement. En même temps, les exportations marocaines en sardine en conserve ont atteint 120.000 tonnes en 2006 contre seulement 48.000 tonnes en 1996», ajoute-t-on. De plus, souligne-t-on, «les navires affrétés utilisent des techniques de chalutage connues pour être dangereuses pour les stocks marins alors que les pêcheurs côtiers utilisent plutôt des senneurs plus respectueux de l'écologie marine». La Fédération de la pêche et de l'aquaculture (FPMA) rejette, pour sa part, «toute disposition, quelle qu'elle soit, de nature à favoriser la dilapidation des ressources de la mer». Elle émet des réserves quant à la prise de mesures se référant au plan d'aménagement du petit pélagique tant que la concertation initiée pour son adoption n'aura pas abouti à ses objectifs. Pour M. Sentissi, les stocks marins sont suffisamment abondants pour satisfaire largement la demande d'une industrie qui exporte aujourd'hui dans 120 pays et qu'il considère comme un ambassadeur du Maroc dans ces pays. Par ailleurs, laisse-t-il entendre, l'industrie de transformation du poisson «ne peut pas rester tributaire des seuls approvisionnements des armateurs de la pêche côtière». M. Sentissi veut aller plus loin et appelle à une libéralisation du secteur. «Il faudrait arriver à libéraliser le prix de la sardine», affirme-t-il en ajoutant que le secteur de la pêche côtière devrait envisager sérieusement sa mise à niveau.