Depuis le 11 mai, la bande de Gaza est le théâtre de violents affrontements entre le Fatah et le Hamas qui rendent inéluctable la fin du gouvernement palestinien d'union nationale. Plus d'une soixantaine de morts, c'est le bilan des affrontements qui opposent depuis le 11 mai les partisans du Fatah à ceux du Hamas dans la bande de Gaza. Les combats ne se limitent pas uniquement aux heurts entre les membres des forces de sécurité relevant de l'Autorité palestinienne et les milices des Brigades Ezzedine Al Kassam, proches du Hamas ou du Jihad islamique. Mettant un terme à sa «politique de retenue», le gouvernement israélien a répliqué à l'intensification sans précédent des tirs de roquettes Kassam sur Sdérot et le sud d'Ashkélon. Il a, en effet, autorisé l'armée israélienne à mener différents raids aériens visant les centres de commandement du Hamas, les auteurs des tirs et leurs commanditaires. «Anarchie», «chaos», «somalisation», tels sont les termes les plus couramment employés par la presse internationale présente sur place pour décrire la situation à Gaza où la population civile se terre dans les abris et où les rares passants sont minutieusement contrôlés par des hommes en armes des deux mouvements, bien décidés à venger leurs morts. Cette dégradation de la situation sécuritaire représente une épreuve de force engagée entre les extrémistes des deux camps qui n'ont pas accepté les Accords de La Mecque signés le 19 mars dernier, sous l'égide du Roi Abdallah d'Arabie Saoudite, ni la constitution d'un gouvernement d'unité nationale à la tête duquel Mahmoud Abbas a reconduit comme Premier ministre, Ismaïl Haniyeh. C'est ainsi que l'aile dure du Hamas à Gaza, regroupée autour des anciens ministres de l'Intérieur et des Affaires étrangères Syad Siyam et Mahmoud Abou Zahar, privés de leurs portefeuilles, ont fait sécession. Ils ont déclenché une flambée de violences, marquée par la tentative d'assassinat d'un haut responsable du Fatah. Dans le même temps, l'homme fort du Fatah à Gaza, Mohammed Dahlan, nommé président du Conseil national de sécurité, porte également une lourde responsabilité. N'ayant jamais caché son hostilité aux Accords de La Mecque qu'il considère comme une «capitulation» devant le mouvement intégriste, il n'a eu de cesse d'entraver l'action du ministre «indépendant» de l'Intérieur, Hani al Kawasmeh, refusant de placer sous ses ordres les membres de la Force 17, une unité d'élite de la Garde présidentielle. Pire, alors qu'il est à la tête du Conseil national de sécurité, Mohammed Dahlan semble totalement se désintéresser de la situation et son absence de la bande de Gaza, fortement critiquée par la presse palestinienne, paraît être une manière pour lui de jouer la carte du pire et de refuser d'imposer à ses partisans une cessation des combats. Plus que ceux d'Israël, Mohammed Dahlan sert ainsi les intérêts de l'Egypte qui n'a jamais caché sa colère d'avoir été mise devant le fait accompli, par la signature des Accords de La Mecque. Le président égyptien accuse le Roi d'Arabie saoudite de vouloir lui ravir la tête des pays arabes modérés en prenant l'initiative, lors du Sommet de Riyad des 28 et 29 mars denier, de relancer son « initiative de paix arabe ». Le chef des services secrets égyptiens, Omar Soleiman et le chef de la délégation sécuritaire égyptienne à Gaza, Borhan Ahmad, ont apparemment convaincu Hosni Moubarak que le gouvernement d'union nationale palestinien non seulement n'était pas viable mais constituait, du fait de la présence à sa tête du Hamas, une menace pour la sécurité intérieure de l'Egypte. En raison, en particulier, des liens entre le Hamas et les Frères musulmans égyptiens, et de leur volonté de déstabiliser les régimes modérés par l'action des mouvements fondamentalistes auprès de leurs opinions publiques respectives. De leur côté, certaines chancelleries occidentales réfléchissent à l'envoi d'une force de paix internationale dotée de pouvoirs suffisants pour ramener le calme. Mais ce calme ne serait que provisoire tant que ne serait pas levée l'hypothèque des sanctions, financières, politiques et économiques, imposées à l'Autorité palestinienne et à son gouvernement depuis avril 2006. Une telle solution suppose un infléchissement de l'attitude israélienne, dont le gouvernement de Ehoud Olmert serait avisé de ne pas faire payer le prix aux pays arabes modérés en exigeant qu'ils adoucissent certaines de leurs exigences concernant les éventuelles négociations à venir sur l'initiative de Riyad. Car cette dernière reste la clef de toute solution du conflit du Proche-Orient tant pour les Israéliens que pour les Palestiniens et, surtout, pour le premier d'entre eux, Mahmoud Abbas, signataire de l'initiative de paix arabe.