L'affaire d'une certaine Rakia Abouali constitue l'un de ces épisodes qui mettent en branle ce rapport, sans jeu de mots, incestueux entre le pouvoir et le sexe. Il y a une dimension relativement pathologique dans cette histoire qui, bien qu'anecdotique, défraie la chronique et en faisant la Une de toute la presse. Décidément les Marocains ont un rapport sulfureux à tout ce qui touche au sexe, en particulier dans sa relation au pouvoir. Notre mémoire charrie encore le souvenir de cet officier de police véreux, aux pratiques sexuelles démesurément fantasmagoriques, qui, il y a une quinzaine d'années, a nourri un moment de gloire de la presse marocaine. Le souvenir est encore plus vivace de cette affaire des jeunes filles d'Agadir qui, malgré leurs foulards, ne résistaient pas aux charmes, sonnants et trébuchants, d'un journaliste belge. Plus récemment encore, un quotidien ostentatoirement vertueux est allé jusqu'à consacrer sa Une, de manière indécente, à l'affaire des jeunes filles qui s'adonnaient à des attouchements, pas très musulmans, devant une Webcam du cyber du centre d'un patelin paumé. L'affaire d'une certaine Rakia Abouali constitue l'un de ces épisodes qui mettent en branle ce rapport, sans jeu de mots, incestueux entre le pouvoir et le sexe. Il y a une dimension relativement pathologique dans cette histoire qui, bien qu'anecdotique, défraie la chronique et en faisant la Une de toute la presse. De quoi s'agit-il ? D'une geisha de l'Atlas comme il y en a tant dans cette région de Khénifra dont la notoriété licencieuse est profondément ancrée dans l'imaginaire marocain. Là-bas, il n'y a rien d'exceptionnel, pour peu qu'on le cherche, à tomber sur une péripatéticienne qui marchande ses vertus. C'est notoire et connu. La probabilité de trouver, dans ces contrées, des filles de joie plus que des nonnes est plus élevée que la moyenne nationale. Alors quoi ? Cette femme de trente cinq ans, qui valide l'affirmation d'Andy Warhol que chacun à son quart d'heure de gloire, a tout de la victime bien consentante que du souffre-douleur qu'on veut faire croire. Elle a fait de sa relation de cul, avec un petit juge ou des gendarmes, un feuilleton érotique après les avoir filmés à leur insu. C'est bien vrai qu'un juge à poil, sans sa robe noire, perd l'essentiel de ses moyens. Nu, il ne garde que des instruments inutiles à sa fonction. Après la douche, ledit juge se confesse sur l'oreiller de sa dulcinée et relate, sur son métier, ce qu'aucun Marocain n'ignore : un peu de corruption, un zeste d'abus du pouvoir, une cuillerée d'intimidation et tutti quanti. Elle est où l'affaire? On ne le sait toujours pas. Au Maroc, on n'en est, tout de même, pas réduit à avoir besoin de l'aveu involontaire d'un magistrat pour révéler les sempiternels dysfonctionnements de la justice. Où est le pouvoir ? Un juge qui entretient, depuis trois ans, une relation avec une tapineuse berbère et pulpeuse fait plus amoureux que maître chanteur usant et abusant de sa fonction. Où est le sexe? Le montage en épingle de cette histoire qui fait pâle figure à côté d'autres affaires, autrement plus graves comme la pédophilie, n'en fera pas pour autant une histoire à la Monica Lewinsky. Le petit juge n'est pas Bill Clinton. Et Rakia est loin d'être une stagiaire. Elle semble plutôt du genre croqueuse d'homme. Tout dans cette affaire, presse comprise, sent un malodorant parfum de racolage.