Quand un dirigeant islamiste ou un imam islamisé condamnent «l'acte terroriste qui cible la vie des musulmans», cela pose un vrai problème. Qu'est-ce qu'il condamne, l'acte lui-même ou le fait qu'il ait ciblé des musulmans ? En invoquant des hadiths qui sacralisent «le sang du musulman» dans leur argumentation, ne légitiment-ils pas, par la même occasion, le fait de tuer les «impies». L'attentat – par accident – du 11 mars dernier à Sidi Moumen est une initiative locale. Le Groupe islamique combattant marocain (GICM) a été totalement démantelé et l'arrestation de Saâd Houssaïni a porté un coup dur à Al-Qaïda. Telles sont les premières conclusions de l'enquête menée par les services de sécurité. Mais les hauts responsables du ministère de l'Intérieur, qui ont fait ces révélations lors d'un point de presse organisé mardi dernier, indiquent que la bataille contre le terrorisme continue et appellent à la vigilance et à la mobilisation générale contre ce phénomène. Cet appel concerne tous les citoyens puisqu'il s'agit d'un danger qui menace la sécurité, la stabilité et le projet sociétal de toute une nation. Mais, il faut préciser que certains acteurs de la vie politique, médiatique, intellectuelle et socio-économique sont plus sollicités que d'autres pour jouer un rôle plus actif dans ce domaine. Se contenter d'un rôle d'observateur devant un phénomène aussi dangereux est une attitude que l'on peut qualifier de crime par omission. Une sorte de complicité qui est aussi condamnable que l'acte terroriste lui-même. Le fait de se limiter à condamner timidement les actes terroristes, dans le cas de certains milieux politiques ou associatifs, peut prêter à équivoque. Alors que la condamnation de l'acte terroriste, quels que soient sa cible, son objectif ou l'idéologie qui le motive, devrait être ferme, certains milieux tiennent des discours plus ou moins ambigus. Quand un dirigeant islamiste ou un imam islamisé condamnent «l'acte terroriste qui cible la vie des musulmans», cela pose un vrai problème. Qu'est-ce qu'il condamne, l'acte lui-même ou le fait qu'il ait ciblé des musulmans ? En invoquant des hadiths qui sacralisent «le sang du musulman» dans leur argumentation, ne légitiment-ils pas, par la même occasion, le fait de tuer les «impies». Quand on salue, dans certains médias, le courage et l'héroïsme des kamikazes du Hamas tout en accusant ceux qui ont choisi la voie de la paix et du dialogue de «trahison de la Oumma et de l'Islam», ne lance-t-on pas un appel à peine déguisé aux jeunes Marocains pour qu'ils suivent la même voie. Le fait que le kamikaze de Sidi Moumen, Abdelfettah Raydi, ait erré dans les rues de Casablanca pendant quatre jours muni d'une ceinture explosive à la recherche d'un lieu pour se faire exploser, n'interpelle-t-il pas ces gens qui présentent les kamikazes du Hamas comme des héros ? Qu'est-ce qui diffère l'acte de tuer des civils à Casablanca de celui de Tel-Aviv? Applaudir ceux qui se font exploser dans un bus à Haïfa est une manière de légitimer le terrorisme. Etre contre le terrorisme, c'est dénoncer toute atteinte à la vie humaine quelle qu'elle soit et condamner sans ambiguïté le discours de la haine et de l'intolérance. Mais glorifier des carnages ailleurs et les dénoncer chez soi est un acte d'hypocrisie qui ne doit plus être toléré.