Agadir. Haja Fadma Zaha est présidente de l'Association Talilt pour le développement d'Aourga Ida Outanane. Pour cette femme de 74 ans, le combat contre l'analphabétisme et la pauvreté est l'affaire de tous. Au quartier industriel de la ville d'Agadir, à côté des unités industrielles, l'enseigne de l'Association Talilt pour le développement d'Aourga Ida Outanane annonce la couleur. Les vitres aux dimensions modestes de son local laissent entrevoir certains produits exposés à l'entrée : nappes, petits sacs faits à la main, sachets de plantes médicinales et bouteilles d'argan. Dans l'une des salles de cette association émane le son de voix féminines. Elles suivent des cours d'alphabétisation. Nul ne peut imaginer que cette femme de 74 ans, habillée en djellaba et foulard, calme, aux traits et la voix doux et qui est en train de les encourager n'est autre que Haja Fadma Zaha, fondatrice de cette association. Pour cette femme au caractère juvénile, le combat contre l'analphabétisme et la pauvreté est un véritable champ de bataille quotidien qui nécessite l'intervention de tous et de chacun. «J'ai appris à lire et à écrire en trois ans entre 1999 et 2002», déclare-t-elle. «J'ai toujours voulu soutenir la femme rurale et l'aider à apprendre à lire et à écrire, mais je n'avais pas la possibilité de le faire». Elle se tait un moment avant de poursuivre : «après la mort de mon mari, je me suis dépensée pour vaincre mon analphabétisme et quand je me suis vue devenir capable de lire et d'écrire, l'idée m'est venue de fonder une association dont l'objectif est de contribuer à l'alphabétisation des femmes de ma région». Haja Fadma évoque ensuite les difficultés de trouver un local pour son association. «Face aux difficultés, j'ai décidé de prendre pour local une ancienne demeure qui m'appartient. Je l'ai meublé de chaises et d'un minimum de matériel et j'ai commencé ma tâche», explique-t-elle. Vaincre l'analphabétisme ne constitue guère le seul souci de cette femme qui inscrit son action dans un processus dont la finalité consiste non seulement à vaincre la pauvreté, mais aussi à aider au développement de la région de Aourga «Pour qu'une femme vienne chez-nous pour apprendre à lire et à écrire, il nous faut prendre en considération ses préoccupations quotidiennes, entre autres : le ménage, l'éducation des enfants, etc. Le temps dont disposent ces femmes pour s'acquitter de leurs tâches et la faiblesse de leurs revenus posent problème», affirme-t-elle avant d'ajouter : «C'est pourquoi on a décidé d'élargir nos horizons pour en faire profiter les femmes au maximum. L'association offre aux femmes l'occasion d'apprendre la broderie, la tapisserie, la couture et divers travaux artisanaux». Dans le même objectif, ajoute-t-elle : «nous exposons leurs produits pour les vendre et l'argent que nous en récoltons constitue un revenu qui aide ces femmes à subvenir aux besoins de leurs familles et à faire face aux difficultés de la vie dans une région enclavée comme la nôtre». La sauvegarde de la nature et plus particulièrement de l'arganier est un souci majeur pour cette femme qui n'arrête pas d'étonner à la fois par ses idées, que par ses actions au profit des femmes et des enfants de la région de Aourga : fêtes scolaires pour les enfants de la région, peintures sur les mûrs des écoles , constitution d'une équipe de football, sensibilisation à l'importance de la sauvegarde de la nature. Cette femme étonne également par ses plans d'action futurs. Elle souhaite réaliser plusieurs unités dans toute la région. «Actuellement nous travaillons sur un projet nommé “les mains blanches“. Nous visons la construction d'un centre d'alphabétisation qui englobe, entre autres, une garderie d'enfants, des locaux pour l'apprentissage des qualifications professionnelles et l'organisation des expositions et ateliers artisanaux féminins»,déclare-t-elle. «Notre devoir est de nous entraider», souligne-t-elle en feuilletant son petit carnet où elle note des versets coraniques, des hadiths mais également quelques dates importantes. «Depuis que j'ai appris à écrire j'ai toujours un agenda où je note tout ce qui m'intéresse, entre autre la date du décès de Feu SM Hassan II et le mariage de notre Roi SM Mohammed VI», déclare-t-elle tout en récitant quelques versets coraniques soigneusement écrits sur les pages de son carnet.