Pour Abdeladim El Hafi, Haut Commissaire aux Eaux et Forêts et à la Lutte contre la désertification, le Maroc doit augmenter considérablement ses efforts de reboisement pour protéger ses forêts. Entretien. ALM: Pouvez-vous nous décrire brièvement l'évolution des forêts marocaines durant ces dernières années ? Abdeladim El Hafi : Notre pays dispose d'un patrimoine forestier riche et diversifié. Les formations forestières naturelles et les nappes alfatières couvrent une superficie d'environ 9 millions d'hectares, soit 8 % du territoire national. Il faut dire que la forêt marocaine connaît des formes d'exploitation à l'origine de l'émergence d'intérêts conflictuels et d'enjeux fonciers, sociaux, économiques et écologiques. Les problèmes de déforestation et de dégradation sont liés actuellement à un triple déséquilibre : d'abord entre les besoins des populations locales et les ressources disponibles, ensuite entre la fragilité des écosystèmes forestiers et les aléas climatiques et enfin entre le niveau de développement des zones forestières et péri-forestières et celui des autres régions agricoles du pays. Est-ce que l'exploitation des forêts marocaines est planifiée ? Les forêts aménagées s'étendent sur une superficie de 2 160 000 hectares, 50 % des formations boisées; cet effort d'aménagement se poursuit dans l'objectif de couvrir l'ensemble des forêts, avec un rythme de 100 000 ha par an. Il est à signaler que les exploitations régulières portent annuellement sur 570 000 m3 de bois d'œuvre, d'industrie et de service, 650 000 stères de bois de feu, 15 000 tonnes de lièges et 16 000 tonnes de produits forestiers non ligneux. A cela s'ajoutent les prélèvements opérés directement par les populations riveraines qui se chiffrent à près de 10 millions de m3 de bois de feu. Y a-t-il des programmes de reboisement planifiés par le Haut Commissariat ? Effectivement. Le plan directeur de reboisement a défini un plan d'action d'urgence de 500.000 ha à reboiser au cours de 10 ans, comprenant 46 % de plantations de production, 42 % pour la protection du sol et des ouvrages hydro-agricoles, 9 % de sylvo-pastoralisme et 3 % pour le loisir.La nouvelle approche managériale adoptée par le Haut Commissariat vise la rationalisation des moyens et l'efficience des actions.Cette démarche s'inscrit dans le cadre d'un programme décennal ambitieux et réaliste, avec des tranches triennales où le reboisement constitue l'action centrale. Vos ressources budgétaires permettent-elles de faire face à ce challenge ? Le rythme de réalisation au cours des dernières années est de l'ordre de 30.000 ha/an. Les efforts consentis par les pouvoirs publics ont permis d'atteindre des niveaux importants de réalisation en superficie d'abord et en qualité de réalisation et de réussite. Aussi, le Haut Commissariat a d'abord œuvré pour optimiser l'utilisation des ressources budgétaires existantes, c'est ce qui a été atteint en 2006, et espère disposer ensuite de plus de ressources budgétaires de manière à augmenter ses actions et la cadence d'exécution. Mesures incitatives pour le reboisement Des mesures incitatives ont été prises dans le cadre du Fonds national forestier, permettant l'octroi de subventions et de prêts remboursables pour le financement d'opérations de reboisement. Il s'agit, entre autres, de l'octroi de subventions en nature sous forme de plants pour l'établissement de plantations d'alignement et de bosquets, à raison de 6000 plants par bénéficiaire et par an. En outre, il y a l'octroi de subventions en espèces pour les reboisements à objectif de production, à hauteur de 30% du coût du projet ou 2500 DH par hectare. Il y a également le reboisement des terrains collectifs, dans le cadre conventionnel, les dépenses étant remboursées à partir des recettes réalisées. Par ailleurs, la promotion de l'utilisation de l'arbre hors domaine forestier engendre la distribution de 4.000.000 de plants par an, soit l'équivalent de 4.000 ha de reboisement.