La direction de la RAM s'est retrouvée, depuis plusieurs semaines, sous les tirs croisés des élus PJD en relation avec une prétendue interdiction des prières. Les premiers concernés, eux, ont d'autres chats à fouetter et le disent. «A voir toute cette polémique, on dirait que les employés de la RAM investissent chaque jour les couloirs de la compagnie pour protester». Cette déclaration d'un syndicaliste de la RAM (Royal Air Maroc) résume à elle seule une véritable tempête dans un verre d'eau : l'insistance des élus PJD à fustiger la direction du transporteur aérien national concernant une prétendue fermeture des lieux de prière et l'interdiction de l'exercice de ce pilier de l'Islam dans ses locaux. Mais surtout l'acharnement des élus islamistes à "défendre" les employés de la RAM contre leur plein gré. Pour l'une des rares fois dans l'histoire du Maroc, on se retrouve face à des "plaignants fantômes" pour porter de graves accusations contre Driss Benhima et son staff. Au sein du milieu syndical, en principe premier concerné par toute violation des droits des salariés de la RAM, on répond qu'il y a eu beaucoup d'"exagération" concernant le sujet. Ni l'ASPENAC (Association du personnel navigant commercial), ni la puissante ATARAM (Association des techniciens aéronautiques de la RAM) et moins l'AMPL (Association marocaine des pilotes de ligne) n'ont émis la moindre réaction officielle, pas le moindre communiqué sur le sujet. Personne n'a posé de question non plus parmi les grands syndicats présents à la RAM (UMT, CDT comme UGTM). Un syndicaliste parle d'autres priorités. «La bonne marche des services de la compagnie est une question cruciale pour nous alors que les salariés sont libres de faire leurs prières sans porter atteinte au déroulement de tous les processus», affirme notre interlocuteur qui évoque une «petite période provisoire» où quelques restrictions avaient bel et bien été décidées. Il fait allusion à l'épisode de l'arrestation des femmes mariées à des pilotes de la compagnie. Sans plus. Avant le mois de Ramadan, deux salariés de la RAM avaient été licenciés sur décision d'un conseil de discipline car, malgré les mises en garde, l'un d'eux a presque délaissé toute activité pour s'improviser prêcheur à la mosquée de la RAM. Selon plusieurs sources au sein du personnel de la RAM, ce sont ces deux individus qui ont fait office d'"hommes ressources" pour les députés du PJD. «Si vous demandez aux salariés l'une de leurs principales préoccupations, ils vous diront qu'ils attendent les primes annuelles qui seront débloquées prochainement», ironise un autre syndicaliste. Driss Benhima et son staff paient aussi les pots cassés pour des décisions prises sous Mohamed Berrada, ajoute une source syndicale. Le voile est toléré, apprend-on, quand il ne s'agit pas de catégories de personnel se trouvant sur le "premier front". Pour le reste, il n'est pas question de dérogations pour ce qui a trait à l'uniforme de la compagnie. Il n'est surtout pas question, ajoute un vieux syndicaliste, de «se présenter en “kamiss“ et passer le clair de la journée tapi dans la mosquée». Le PJD contre le reste du monde La polémique a éclaté en septembre dernier quand "Attajdid", publication du MUR et du PJD, a commencé à multiplier les articles incendiaires contre la direction de la RAM en relation avec le sujet. Les députés islamistes saisissent la balle au vol pour demander la constitution d'une mission d'information. Avec la discussion des budgets sectoriels, c'est Karim Ghellab qui est sévèrement pris à partie par les élus du PJD, le 9 novembre. La réunion se transforme, par la volonté et l'acharnement des députés islamistes, en procès contre le ministère, le gouvernement et la direction de la RAM. Rien ne ramènera les amis de Mostafa Ramid et ses amis à de meilleures dispositions, ni les démentis de Karim Ghellab, ni les éclaircissements de Nabil Benabdellah (à l'issue du dernier Conseil de gouvernement) et moins les explications avancées par la direction du transporteur national. Pire encore, la chaîne qatarie "Al Jazeera" entre en jeu et nous sert un autre chef-d'œuvre en matière de bidonnage : un homme, présenté comme étant un employé de la RAM, qui confirme les accusations des députés islamistes. Il s'avérera que la personne en question a engrangé une belle cagnotte depuis plusieurs semaines pour couler une confortable retraite anticipée.