Un employé marocain du consulat des Etats-Unis à Casablanca a fait malgré lui un voyage aller simple à New York. Chronique d'une affaire mystérieuse. Mustapha Hamdi n'a plus donné signe de vie depuis environ trois mois. Employé au service des visas-immigrants au consulat des Etats-Unis à Casablanca, ce père de famille disparaît lors d'une escale à sa descente d'avion à New York alors qu'il s'apprête à prendre une correspondance pour rejoindre sa destination finale, Washington. C'était le samedi 8 avril 2006. Objet du voyage : un stage d'une semaine dans la capitale américaine sur les nouvelles procédures de visa, financé par le gouvernement fédéral. M. Hamdi, 23 ans de bons et loyaux services, une dizaine de séjours professionnels aux USA, n'est pas seul. Il est en compagnie, pour cette formation, d'un collègue marocain qui venait de rejoindre le service où il officie tous les jours. Affolé, le premier cherche le second dans tous les coins et recoins de l'aéroport. En vain. On dirait qu'il s'est volatilisé… Mustapha Hamdi s'est-il égaré dans le gigantesque aéroport JFK ? Ou s'est-il sciemment égayé dans la nature ? Cependant qu'il attend comme un miracle la réapparition de son compagnon, il tourne et retourne, extrêmement préoccupé, ces deux hypothèses dans sa tête mais aucune ne lui semble plausible. Se doutant que quelque chose de grave était arrivé à son compatriote, il a dû, la mort dans l'âme, poursuivre son itinéraire sans son ami. «Mais le lendemain de son arrivée à destination, nous confie-t-on, le stagiaire reçoit deux personnes dans le hall de son hôtel Mariott Roselyn. Ces étranges visiteurs lui ont dit de suivre normalement son stage tout en lui apprenant que Mustapha Hamdi est entre de bonnes mains». Lesquelles ? Mystère et boule de gomme. Au consulat US de Casablanca, tout le monde connaît le film de la disparition brutale de M. Hamdi, mais on s'efforce, du côté marocain, de faire comme si de rien n'était. Et pour cause… Les couloirs et les bureaux sont placés sous haute surveillance à grands renforts de caméras. Les regards, pendant les premiers jours, se croisent d'un air entendu laissant deviner que Mustapha Hamdi a été victime d'un kidnapping. Mais par qui ? FBI, CIA ? Et pourquoi ? Plus étrange encore : les responsables américains du consulat, qui n'ont pas daigné communiquer sur cette affaire, ne se sont pas visiblement inquiétés outre mesure du sort d'un de leurs plus anciens employés. Contacté par nos soins, le consul général US à Casablanca, Douglas Green, a fait juste cette déclaration laconique : «nous ne commentons pas les affaires en cours de justice ». Ainsi le dossier de M. Hamdi serait-il en instance de jugement. Mais devant quelle juridiction et pour quelle raison ? Le consul ne dira pas plus. Un élément nouveau viendra, deux jours après "l'évaporation" de l'intéressé, confirmer qu'il est bel et bien en délicatesse avec les autorités américaines : le disque dur de son ordinateur dans son lieu de travail sera saisi. Par qui ? Là aussi, motus et bouche cousue. Il devient désormais évident pour ceux qui connaissent la victime que le stage n'était qu'un stratagème destiné à l'attirer dans un piège. En dehors du territoire national. Conséquence de cette histoire inhabituelle, le personnel marocain travaillant dans les différents services américains rechigne désormais à partir en formation aux Etats-Unis. Trop risqué! Un homme a accepté cependant de nous parler sous couvert d'anonymat. Pour lui, ce qui est arrivé à Mustapha Hamdi, dont le salaire a été suspendu depuis le mois de juin dernier, a certainement un lien avec son travail consistant en l'examen des demandes de visas dans le cadre du programme DV (Diversity Visa) accordés pour les heureux gagnants dans la fameuse loterie. Contactée, l'épouse de Mustapha Hamdi ne semble pas être au courant des malheurs de son mari. Ainsi personne ne lui a dit ce qui lui est arrivé. Pour elle et pour ses enfants, il est toujours en mission aux Etats-Unis...