Bio, plats cuisinés, culture hydroponique, plantes médicinales... Renforcer le positionnement de la filière agroalimentaire marocaine et en faire le fer de lance de la souveraineté alimentaire au Maroc dans un contexte international mouvant. C'est l'approche adoptée par un récent Policy Paper publié par l'Institut marocain d'intelligence stratégique intitulé «L'industrie agroalimentaire : le Maroc futur champion régional». En effet, cette industrie fait face à de nouveaux défis liés en grande partie aux challenges imposés par la crise de la Covid-19, au conflit militaire en Europe entre la Russie et l'Ukraine et aux changements climatiques. A cet effet, cette étude propose de construire une nouvelle vision pour le secteur et qui pourrait se concrétiser à l'horizon 2030. Cette réflexion plaide pour la redynamisation totale de toute la chaîne de valeur agro-industrielle marocaine en se basant sur quatre impératifs majeurs, à savoir: Sécurité, Intégration, Durabilité et Innovation. Il s'agit aussi d'identifier les leviers d'une nouvelle émergence basée sur la digitalisation comme un levier d'amélioration de la productivité, l'innovation en vue de valoriser de plus en plus les ressources du pays et la décarbonisation de la production industrielle nationale à travers l'introduction de gammes de produits à forte valeur ajoutée. Pour les auteurs de ce document, la combinaison de chaînes de valeur complexes et la multiplicité des produits ont fait de la gestion de la chaîne d'approvisionnement un véritable défi. «De manière générale, des opportunités se dessinent, avec le raccourcissement des chaînes de valeur et la recherche de relocalisation en Europe. Le développement de la demande pour les végétaux à forte valeur nutritive et ajoutée et pour les produits bio offre au Maroc des possibilités pour augmenter ses productions, tant fraîches que transformées», révèle ladite étude ajoutant qu'en matière de respect de l'environnement, le Maroc a également des atouts certains à faire valoir. «Des atouts que le Royaume devrait mettre sur la table dans ses négociations d'un accord de libre-échange rénové avec l'UE, en vue d'une plus grande complémentarité entre les chaînes de valeur marocaines et européennes. Ce nouvel ordre économique et commercial présente également de nouvelles opportunités pour le Maroc dans l'espace méditerranéen, perçu jusque-là comme une zone de concurrence», indique la même source donnant pour exemple les cas de la Turquie et de l'Egypte. «Ces deux pays constituent pour le Maroc des concurrents importants et accaparent des parts de marchés croissantes dans le secteur agro-industriel, aussi bien sur les marchés internationaux ciblés par les opérateurs marocains que sur le marché interne où ces deux pays ont augmenté de manière sensible leurs expéditions de marchandises. Ceci intervient pourtant au moment où de grandes possibilités de cumul de valeur ajoutée entre les pays sud-méditerranéens pourraient dynamiser les investissements industriels conjoints», précisent les auteurs de cette étude. D'autres opportunités fructueuses se présentent pour le Maroc, notamment avec le partenariat relancé, fin 2020, entre le Maroc et Israël. «Dès la reprise des contacts officiels courant décembre 2020, les deux pays ont signé un mémorandum d'entente portant sur l'innovation et le développement des ressources en eau, et plusieurs autres accords dans le domaine agricole. En effet, Israël est l'un des pays qui a su gérer au mieux le stress hydrique en utilisant des techniques innovantes en matière d'irrigation, assurant économie d'eau et efficacité. Dans le désert du Néguev au sud, célèbre par son aridité quasi constante, plusieurs exploitations ont vu le jour. Il s'agit ainsi d'un laboratoire à grande échelle qui a connu la mise en œuvre de plusieurs programmes agricoles de développement dans différentes filières», rapporte la même source. De plus, Israël en tant que «start-up nation» compte la plus grande concentration mondiale d'entreprises innovantes par rapport au nombre d'habitants. Nouvelles technologies, télécoms, agriculture ou encore biotechnologie... les domaines dans lesquels ces entreprises investissent sont divers et variés. «Le Maroc nourrit l'ambition de mettre à profit cette expérience pour donner un nouvel élan au développement des start-up locales. Cette coopération nouvelle peut se matérialiser notamment dans la niche du cannabis, où la méthode israélienne offre au Maroc un modèle inspirant qui peut attirer des investissements étrangers. Autorisé depuis les années 2000 en Israël, l'usage médical et l'exportation du cannabis sont devenus pour le pays un atout pharmaceutique et agricole majeur. Et avec près de 50.000 hectares de culture de cannabis et un savoir-faire ancestral, le Maroc pourrait également bénéficier d'un boom économique grâce à l'industrie du cannabis thérapeutique, surtout après la légalisation en décembre 2020 de la culture du chanvre pour les usages thérapeutiques».