Pour réduire les violences routières et par conséquent le nombre de victimes de la route, la réglementation a évolué au fil du temps prenant en compte les risques émergents et les comportements des usagers. La violence routière a de lourdes conséquences socio-économiques. Chaque année, plus de 3.500 tués et plus de 10.000 blessés graves sont enregistrés au Maroc. Le pays a érigé la sécurité routière en priorité nationale et adopté sa première stratégie nationale en la matière en 2005, lors de la 1ère réunion de la commission ministérielle chargée de la sécurité routière. Avant d'évaluer les résultats actuels et se pencher sur les perspectives, il est essentiel de faire un tour d'horizon des dates marquantes de la stratégie de la sécurité routière au Maroc du point de vue réglementaire et institutionnel. De 1953 à 2005... La politique de la sécurité routière au Maroc est passée par plusieurs étapes marquantes depuis le décret sur la conservation de la voie publique en 1953 jusqu'à ce jour. Dans son dernier numéro, la revue de la police met d'ailleurs en exergue les principales phases de la stratégie de la sécurité routière au Maroc et les efforts accomplis pour renforcer le dispositif qui l'accompagne. Il faut dire que le pays a adhéré dès 1959 à la Convention internationale sur la circulation routière et du protocole de l'acte final de Genève de 1949 (Dahir n°I-58-210 du 7 joumada II 1379,- 8 décembre 1959- portant publication de la Convention internationale sur la circulation routière, du protocole de l'acte final de Genève du 19 septembre 1949). Le Maroc a aussi établi un cadre institutionnel et réglementaire de la gestion de la sécurité routière, parallèlement à des stratégies et des plans d'actions pour lutter contre l'insécurité routière. A cette époque, le cadre juridique de la sécurité routière au Maroc était régi par le Dahir relatif à la conservation de la voie publique et la police de circulation et de roulage datant du 19 janvier 1953. Pour réduire les violences routières et par conséquent le nombre de victimes de la route, la réglementation a évolué au fil du temps prenant en compte les risques émergents et les comportements des usagers. Vient ainsi l'obligation du port du casque de protection, puis la ceinture de sécurité, les limitations de vitesse ou encore l'usage du téléphone au volant. «Ces mesures ont été appuyées par l'intégration des technologies de contrôle comme les radars qui ne cessent d'évoluer et de s'automatiser, pour réduire le sentiment d'impunité chez les contrevenants», indique la même source. Avec le nombre croissant des accidents de la circulation et leurs répercussions négatives sur l'économie et le développement du pays, le Maroc a mis en place un organe spécialement dédié au management intégré de la sécurité routière. D'où la création du Comité national de prévention des accidents de la circulation «CNPAC» par le décret n°2-72-275 du 15-07-1977 et placé sous la tutelle du ministère de l'équipement, du transport, de la logistique et de l'eau. 2005, l'année du lancement de la stratégie L'année 2005 a marqué un tournant décisif pour la politique de la sécurité routière dans le pays avec la réunion ministérielle chargée de la sécurité routière présidée par Sa Majesté le Roi Mohammed VI le 18 février de la même année. Ainsi, le 18 février a été retenu pour célébrer chaque année la journée nationale de la sécurité routière. Pour assurer le suivi de la stratégie nationale de la sécurité routière, un Comité permanent présidé par le ministre du transport a été établi. S'ensuivit une réforme du cadre juridique. A cet effet, la loi n° 52-05 portant code de la route a été élaborée en 2010. Celle-ci a été modifiée et complétée en 2016 par la loi n°116-14. La Narsa voit le jour Le dispositif de la sécurité routière a été renforcé avec la création de l'Agence nationale de la sécurité routière (NARSA). Ainsi, la loi n°103-14, publiée au Bulletin officiel du 12 mars 2018, a créé cet établissement public. Par la suite, le décret n° 2.19.732 portant application de la loi n° 103-14 a été publié au Bulletin officiel du 10 octobre 2019. La Narsa se substitue dans ce sens au CNPAC avec un champ d'action plus large. Cette structure se focalise sur toutes les facettes du management de la sécurité routière et en devient le principal acteur. Outre des aspects communication et sensibilisation, elle détient de nouvelles missions comme agréer les personnes auxquelles sera attribuée la conception des plaques d'immatriculation des véhicules, organiser les examens pour l'obtention du permis de conduire, délivrer les permis de conduire, tenir le fichier national du permis de conduire et gérer le capital des points qui lui est affecté, homologuer les véhicules, leurs dispositifs et leurs accessoires, délivrer le certificat d'immatriculation des véhicules et tenir le fichier national des véhicules, procéder aux contrôles techniques et aux contrevisites techniques des véhicules, gérer le système de contrôle et de constatation automatisés des infractions par l'utilisation d'appareils techniques, conformément à la législation et la réglementation en vigueur, élaborer et évaluer les plans nationaux du contrôle, en coordination avec l'ensemble des organismes chargés du contrôle routier, procéder aux opérations de sensibilisation, de communication et d'encadrement dans le domaine de la sécurité routière ou encore établir des plans et des programmes sur l'éducation routière au profit des enfants et des jeunes et veiller à leur exécution. D'ailleurs, l'Agence avait présenté le plan national de contrôle routier pour la période 2022-2024, dans le cadre de la mise en œuvre de la stratégie nationale de la sécurité routière 2017-2026. Un bilan loin d'être satisfaisant Sur le bilan de la sécurité routière, Mohammed Abdeljalil, ministre du transport et de la logistique avait présenté au Conseil de gouvernement qui s'était tenu 17 février 2022 un état des lieux de la sécurité routière au Maroc. Pour lui, la stratégie nationale intégrée de sécurité routière couvrant la décennie 2004-2013 a permis de maîtriser la tendance annuelle haussière des accidents de la circulation, en plus de l'institution d'un Comité interministériel de sécurité routière et d'adopter la loi 52-05 portant code de la route, entrée en vigueur le 1er octobre 2010. Il a rappelé que l'évaluation de cette stratégie a permis d'élaborer une nouvelle stratégie pour la période 2017-2026 impliquant l'ensemble des acteurs concernés. L'objectif étant de réduire les tués de 50% à l'horizon 2026. Cette stratégie a été déployée à travers un premier plan quinquennal 2017-2021 qui vise à réduire le nombre de tués à 25% en 2021, soit moins de 2.800 tués, cependant le bilan enregistré à la fin de cette période a atteint 3.676 tués, empêchant ainsi l'atteinte de l'objectif fixé. Par ailleurs et bien que ces résultats restent éloignés des objectifs fixés, certains acquis sont à mettre en avant comme l'amendement du code de la route, avec l'introduction de nouveaux délits ; le lancement d'un nouveau programme d'extension du réseau de radars fixes avec l'ajout de 552 unités de nouvelle génération ; le lancement de la 2ème phase du Programme spécial des aménagements de sécurité routière (PSAS) en 2017, pour un montant de 2,2 milliards de dirhams ; l'augmentation des primes du programme de renouvellement du parc ; le lancement du programme de prise en charge de la formation des conducteurs professionnels, avec un budget annuel de 100 millions de dirhams ; en plus de la création de la NARSA en 2018. Le ministère travaille sur l'évaluation de la première phase de cette stratégie pour identifier les contraintes qui ont retardé l'atteinte des objectifs fixés. Le ministre a expliqué par ailleurs que la mise en place d'un nouveau plan quinquennal 2022-2026 dans les mêmes conditions que le précédent n'est pas de nature à permettre l'atteinte de la réduction de 50% du nombre de tués en 2026, soulignant que l'évaluation devrait identifier les moyens susceptibles d'atteindre les résultats souhaités, dans le cadre de nouveaux objectifs fixés en cohérence avec la décennie d'action mondiale 2021-2030.