Le Maroc ne peut être ni une gare de triage pour une Europe égoïste et amorale ni un camp de transit factice dans lequel la durée de séjour serait l'éternité ni un cul-de-sac dans lequel les aspirations africaines les plus légitimes viennent se fracasser. L'Union européenne ne peut plus désormais se masquer la face devant le drame des Subsahariens. La pression démesurée et irresponsable exercée sur notre pays par l'UE a abouti à une gestion sécuritaire qui a rapidement montré ses limites. L'équation telle qu'elle est formulée par les Européens, à savoir le refus absolu d'admission des migrants dans un espace Schengen sanctuarisé et la nécessité formelle des respects des droits humains les plus élémentaires pour cette population fragile est, nous le répétons, foncièrement hypocrite. En créant la situation qu'ils dénoncent, les Européens jouent puérilement au pompier pyromane avec la vie des gens. Bruxelles veut nous assigner une fonction précise dans la lutte contre l'immigration clandestine. Une sorte de division honteuse du travail qui ferait que le plus sale boulot dans cette lutte soit externalisé ou délocalisé au Maroc. Les couinements moraux ou les jappements éthiques que vous entendez ne sont que de pure forme. Or il y va de la survie de notre pays, du choix de société qu'il a fait, et des valeurs qu'il défend de refuser absolument ce rôle indigne. Le Maroc ne peut être ni une gare de triage pour une Europe égoïste et amorale ni un camp de transit factice dans lequel la durée de séjour serait l'éternité ni un cul-de-sac dans lequel les aspirations africaines les plus légitimes viennent se fracasser. Nous n'avons aucun intérêt à ouvrir un débat avec les Européens sur les moyens financiers nécessaires au travail de gendarmerie qu'ils veulent nous faire faire d'une manière structurée et durable. À 40 millions d'euros ou à 250 millions d'euros le refus de la création de camps de la honte au Maroc doit être pour nous une position de principe. Que l'on ait les moyens de sécuriser nos frontières, notamment à l'Est avec l'Algérie est une nécessité impérieuse. Sinon le flux ne diminuera jamais. Encore faut-il que l'UE ait le courage et la volonté politiques d'impliquer réellement ce pays dans cette lutte et lui faire assumer ses responsabilités. La focalisation des Européens sur la supposée responsabilité exclusive et totale du Maroc dans le drame des Subsahariens – c'est-à-dire les malheurs d'un continent - peut être appréciée comme une cécité ou parfois comme une ignorance. Mais, aujourd'hui, elle revêt toutes les formes d'une lâcheté quand elle s'obstine à nier la réalité et la complexité du problème. Encore un effort, messieurs les Européens, et vous réaliserez que la forteresse que vous avez bâtie ne vous protégera contre aucune adversité. L'espérance humaine est plus forte que tous les Schengen du monde.