Se poser en "défenseurs de la liberté" d'une bande de mercenaires à la solde d'Alger là où il s'agit de faire preuve d'intelligence et de discernement relève au mieux de la cécité politique et au pis de la mauvaise foi. Y a-t-il un dialogue possible entre les intellectuels espagnols et leurs homologues marocains ? À en juger par la réponse des premiers à l'appel des seconds publié récemment dans un journal espagnol, il est légitime d'en douter. Les conditions ne sont pas réunies, du moins pour l'instant. La raison ? La schizophrénie qui semble être installée comme un atavisme dans certains milieux espagnols dès qu'il s'agit des affaires marocaines dont la principale concerne le Sahara. Une duplicité qui structure la psyché de ceux qui s'érigent en défenseurs d'une cause chimérique au nom en plus de fausses données historiques selon lesquelles le Sahara “était une colonie espagnole qui n'a pas été décolonisée“ conformément à la légalité internationale. Or, ce territoire, au moment de son occupation par l'armée espagnole, n'était nullement entre les mains d'un État sahraoui. L'occupation du Royaume en 1912 procédait bel et bien d'un partage de l'empire chérifien (le nord et le sud pour l'Espagne et le centre pour la France). Les provinces sahariennes n'étaient pas sous souveraineté d'une quelconque entité sahraouie pour que l'on cherche aujourd'hui à l'imposer sous couvert des résolutions onusiennes. L'honnêteté intellectuelle voudrait qu'Antonio Gala et ses amis dénoncent plutôt les injustices nées du tracé des frontières décidé par les forces coloniales après leur départ. Un tracé qui s'est opéré largement au détriment du Maroc, lequel s'est vu amputer d'une bonne partie de son territoire au profit de l'Algérie dont les intellectuels espagnols et la droite aznariste épousent étrangement les thèses au sujet du conflit factice du Sahara. L'Algérie, historiquement le géniteur du Polisario, continue jusqu'à aujourd'hui de l'armer, de le nourrir et de le soutenir pour gêner la marche du Maroc vers le développement. Si une partie de l'opinion espagnole se sent sentimentalement proche de la bande à Abdelaziz c'est son problème. Mais un intellectuel quel qu'il soit n'est-il pas censé privilégier dans sa démarche la raison plutôt que la passion? Se poser en “défenseurs de la liberté“ d'une bande de mercenaires à la solde d'Alger là où il s'agit de faire preuve d'intelligence et de discernement relève au mieux de la cécité politique et au pis de la mauvaise foi. Passons sur le fait que l'intelligentsia ibérique accepte le fait colonial au Maroc où elle approuve le même séparatisme qu'elle refuse chez elle pour souligner cette réalité incontournable : un État-croupion au Sahara ne sera jamais viable. Et il est hors de question de déstabiliser un Maghreb qui ne saura être construit sur un foyer de tension permanent et dangereux. Dialoguer avec les intellectuels espagnols ? D'accord, mais à condition qu'ils abandonnent les préjugés ainsi que les clichés qui heurtent le sens du vraisemblable et alternent les jugements objectifs et sains. D'accord, mais encore faut-il que ces intellectuels veuillent sincèrement regarder leur voisin du sud avec d'autres lunettes. Celles de l'ouverture et de la sincérité.