Goodyear veut se séparer de 150 employés pour les besoins de la restructuration. Une opération difficile à négocier. L'entreprise tourne au ralenti depuis le mois d'avril dernier. Climat social tendu chez Goodyear Maroc. En difficulté, l'entreprise sise à la zone industrielle d'Aïn Sebâa (Casablanca) tente d'imposer à ses employés le principe d'un départ volontaire en vue d'une restructuration devenue indispensable. En tout, 150 ouvriers sont concernés. Mais la conclusion de ce programme butte sur plusieurs points. La direction tient à négocier le départ par tranches de salaires. Les syndicats préfèrent comme base de fixation des indemnités la tranche d'âge et l'ancienneté. Des positions aux antipodes l'une de l'autre. Dans un premier temps, la direction proposait 60 000 dirhams pour un ouvrier gagnant moins de 5 000 dirhams et 134 000 dirhams quand le salaire dépasse 9 000 dirhams, et ce quelle que soit la durée de son service au sein de l'entreprise. Cette proposition a été rejetée par les salariés, cela après s'être rendus compte que 50 % des personnes concernées ont moins de cinquante ans. Les sommes perçues étaient insuffisantes. La direction revient à la charge, relevant la fourchette des indemnités de 60 000 à 75 000 dirhams pour les bas salaires et de 134 000 à 202 500 pour la seconde catégorie. Sans succès, les ouvriers reprochant à Goodyear de ne pas tenir en compte l'ancienneté. Toujours accrochés au principe du départ négocié sur la base de la tranche d'âge et de l'ancienneté, les employés revoient quand même leurs propositions à la baisse. Sans grands effets sur la direction qui invoque le manque de moyens. «Nous avons même proposé en dernier ressort d'étaler le payement des indemnités sur deux ou plusieurs échéances. En vain», indique Moustapha Louahid, secrétaire général du syndicat des travailleurs de Goodyear affilié à l'UMT. Les dernières réunions entre le staff de l'entreprise, les délégués syndicaux et l'Inspection du travail, tenues successivement les 13 et 28 juin n'ont rien donné. Une rencontre est prévue dans les jours à venir avec le gouverneur d'Aïn Sebâa. Rappelons que depuis 2001, Goodyear fait face à des difficultés d'ordre financier. A l'époque déjà, un premier plan avait abouti au départ de 150 personnes intérimaires et 34 titularisés. Non satisfaits de leurs conditions de départ, ceux-ci ont saisi la justice. Durant les trois dernières anées, la situation de Goodyear se serait dégradée. Les choses se sont accélérées le 17 décembre 2004 quand les 378 ouvriers de l'entreprise sont tous placés en chômage technique pour cinq semaines. Le travail a repris le 31 janvier. Et depuis le 14 avril 2005, Goodyear fonctionne au ralenti, avec un chômage technique partiel. Les ouvriers ne perçoivent que la moitié de leurs salaires. Aigris par plusieurs mois d'activité réduite, les employés soupçonnent le staff directionnel de vouloir réduire la présence de Goodyear au Maroc en un simple point de vente. Les pneus revendus actuellement dans le marché marocain proviendraient pour certains, de la Turquie, de la Slovénie et d'autres pays de l'Est. Dernièrement, la direction aurait même proposé à leurs revendeurs d'aller s'approvisionner directement à partir du port. Ce qui fait encore moins de boulot à Aïn Sebaâ. Impossible de confronter ces allégations syndicales avec les positions du staff managérial. Le directeur général, Christian Billot et le directeur commercial et marketing, Mohamed Touhami El Ouazzani n'ont pas donné suite aux nombreux appels d'ALM. Sur les difficultés de cette entreprise, pendant longtemps, aux commandes du secteur de l'industrie du pneu, les zones d'ombre sont nombreuses. Compétitivité, investissements mal ficelés sur des machines de seconde main, processus de mise à niveau tardif. Bref, les hypothèses sont nombreuses. En tout cas, le processus de démantèlement tarifaire ne peut expliquer à lui seul la déroute de Goodyear. Ni d'ailleurs, le silence de son staff. • Fadoua Ghannam & Adam Wade