La tournée d'Ariel Sharon en Europe s'avère un véritable fiasco pour le Premier ministre israélien. L'isolement de Yasser Arafat ne servira en rien la cause de la paix. «Tout contact avec Arafat affaiblit Abbas», une formule usitée par Ariel Sharon et devenue routinière depuis quelque temps. Une formule dont le contenu, ou plutôt le desideratum fait l'objet de la visite du Premier ministre israélien à des pays européens. Cependant, les tentatives d'Israël de mettre Yasser Arafat sur la bande de touche s'avèrent infructueuses. Elles ont tout bonnement essuyé un double échec. D'une part, le leader palestinien a réussi à conforter son autorité face à son Premier ministre Mahmoud Abbas. Sur un autre plan, aussi bien Londres que Moscou refusent de couper les ponts avec lui. En effet, à l'issue d'une visite officielle à Londres, achevée hier, Ariel Sharon n'a pas réussi à convaincre son homologue britannique, Tony Blair, de boycotter son ennemi depuis des lustres, le leader de l'autorité palestinienne. Une rencontre antérieure avait réuni Sharon avec Jack Straw, dans le même dessein. Mais il s'est heurté à une fin de non-recevoir. Le secrétaire du Foreign office a clairement fait savoir que la position britannique, qui est aussi celle de l'Union européenne, consiste à continuer de traiter avec Yasser Arafat. La position européenne à ce propos est on ne peut plus claire. En d'autres termes, l'Europe estime que Yasser Arafat est incontournable, en sa qualité de président élu du peuple palestinien et de symbole vivant de l'aspiration de celui-ci à un Etat indépendant. Coup dur pour l'Etat hébreu, cette position, qui a été réaffirmée lundi soir par Tony Blair, a été cependant été qualifiée de "divergences" de la part d'Israël. Le secrétaire d'Etat britannique au Proche-Orient, la baronne Elizabeth Symons, en visite en Jordanie, avait pour sa part déclaré : "Nous aurons beaucoup à travailler avec le Premier ministre palestinien, mais Arafat reste une personnalité importante et le leader élu du peuple palestinien". Ménachem Klein, enseignant au Département d'études politiques de l'Université Bar-Ilan de Tel-Aviv, avait quant à lui indiqué que la stratégie de Sharon visant à mettre le vieux leader palestinien sur la touche est "simpliste" et vouée à l'échec. Sharon n'aura pas plus de succès lors de la visite de quelques heures qu'il devait effectuer hier en Norvège, pays qui est traditionnellement très impliqué dans les contacts secrets entre les deux parties, notamment lors des négociations qui aboutirent en 1993 aux accords d'Oslo. "Notre réponse est la même que celle de la Grande-Bretagne", avait déclaré le Premier ministre norvégien Kjell Magne Bondevik. Pendant ce temps-là, bloqué depuis près de deux ans dans les décombres de son QG à Ramallah en Cisjordanie, Yasser Arafat parvenait à aplanir les différends avec son Premier ministre. Un second revers pour les tentatives d'isoler Arafat initiées par Sharon, qui regrette publiquement aujourd'hui de ne pas avoir achevé le leader palestinien, lors de l'invasion du Liban en 1982.