Yasser Arafat n'a pas assisté à la messe de minuit lundi soir à l'église Sainte-Catherine de Beit Lahm (Cisjordanie). Son siège est resté vide. Quatre jours de bras de fer avec Sharon ont eu raison de la volonté de M. Arafat d'assister à la messe. Une cérémonie à laquelle il assistait chaque année. « Je vous parle et mon cœur est plein de regrets pour vous dire que les chars et les barrages israéliens m'ont privé d'être à vos côtés », avait-il déclaré dans un message de vœux aux chrétiens palestiniens transmis en direct par la télévision palestinienne. C'est la première fois que le président palestinien passait Noël loin de Beit Lahm depuis que l'Autorité palestinienne avait pris en charge la Cisjordanie en 1995. Arafat a été empêché de se rendre sur place par le Premier ministre israélien Ariel Sharon, qui s'est attiré de nombreuses critiques dans le monde entier, y compris du Vatican, qui a qualifié cette décision d'«arbitraire ». Le siège vacant de M. Arafat était symboliquement occupé par un keffieh, alors que Chrétiens et partisans de la cause palestinienne avaient pris place en masse dans l'église qui jouxte la basilique de la nativité. Le patriarche latin de Jérusalem, Mgr Michel Sabbah, a condamné l'attitude d'Israël qu'il a qualifiée de véritable « agression». En prenant cette décision « Israël s'est tiré une balle dans le pied », titre mardi le quotidien israélien Maariv, citant les milieux israéliens de la défense. « Arafat est resté chez lui à la maison et a gagné la sympathie de la communauté internationale », titre de son côté le quotidien à grand tirage Yédiot Aharonot, également très critique de la décision du Premier ministre israélien Ariel Sharon. «C'est une décision stupide et impossible à défendre », selon des hauts responsables du ministère israélien des Affaires étrangères, cités par le journal. Des réactions qui ne sont pas dénuées d'arrière-pensées politiques. Car, ajoutent les mêmes responsables, « qui se souviennent qu'il y a une semaine encore le monde entier dénonçait Arafat, y compris ses partisans en Europe. Nous avons ruiné tout le crédit que nous avions réussi à gagner sur le front de l'information. Arafat est devenu une star pour les médias internationaux. Il ne pouvait espérer de plus beau cadeau de Noël » d'Ariel Sharon ». Shimon Pérès, le ministre des Affaires étrangères israélien, qui, avec les autres ministres travaillistes du gouvernement, s'est prononcé contre l'interdiction de mouvement faite à M. Arafat, avait déclaré dimanche à la radio militaire israélienne : « Je ne tiens pas à ce que le fait que nous empêchions Yasser Arafat de se rendre à Bethléem devienne le sujet de conversation de Noël à travers le monde chrétien. Qu'il y aille et qu'il prie ». Un vice-ministre du Likoud, le parti de Sharon, Gideon Ezra, a également critiqué cette décision. De son côté, Pékin a regretté la décision des autorités israéliennes, estimant qu'elle ne faciliterait pas une réduction de la tension au Proche-Orient. Pour lever cet interdit, Israël exigeait notamment de l'Autorité palestinienne qu'elle arrête les meurtriers d'un ministre israélien assassiné le 17 octobre à Jérusalem. Cet attentat avait été revendiqué par le Front Populaire de Libération de la Palestine (FPLP) en représailles au meurtre de son chef, Abou Ali Mustapha, fin août, par Israël. Finalement, Sharon aura raté son effet.