Les experts plaident pour la création d'une Agence nationale de la santé Dans le contexte actuel, et jusqu'à à ce qu'un vaccin à visée thérapeutique soit disponible, le Maroc doit se préparer sans cesse à vivre avec ce virus et à réduire ses conséquences sur la santé des populations, malgré toutes les incertitudes qui l'accompagnent. La crise sanitaire engendrée par la pandémie de Covid-19 a montré la nécessité d'une réforme urgente du système de santé au Maroc. Lors d'un webinaire organisé par la Chambre de commerce britannique intitulé «Impact de la Covid-19 sur le système de santé marocain», le Pr. Jaafar Heikel, directeur de la clinique Vinci et médecin épidémiologiste, a fait remarquer que «la réalité est qu'aujourd'hui il faut restructurer notre système de santé de telle sorte qu'il puisse être plus réactif et être en mesure de répondre à la demande et aux besoins de santé de la population marocaine». Concernant l'impact et l'avenir de la santé au Maroc, le Pr Heikel a émis l'idée de créer une Agence nationale de la santé qui assisterait le ministère de la santé dans ses décisions. «Il faut créer une entité indépendante, à savoir une Haute Autorité de la santé ou un Haut-Commissariat à la santé qui serait amené à aider l'Etat à prendre les bonnes décisions sur la base des recommandations importantes qu' elle formulera». Une proposition partagée par le Pr. Chakib Nejjari, président de l'Université Mohammed VI des Sciences de la Santé (UM6SS). «L'amélioration de notre système de santé passe par plusieurs paramètres. Il faut un budget plus important. Se pose aussi la problématique des ressources humaines aussi bien sur le plan quantitatif au niveau de la répartition à l'échelle nationale que sur le plan qualitatif. La Covid-19 a montré que le Maroc manque de médecins et d'infirmiers. Il y a beaucoup de spécialités où il y a une véritable pénurie telles que les anesthésistes-réanimateurs», a-t-il déploré. Un autre élément important est à signaler dans la gestion de cette crise, à savoir le manque d'implication du secteur privé. «Nous n'avons pas suffisamment fait participer le secteur privé dans la lutte contre la Covid-19 sachant que la moitié des professionnels de santé sont dans le privé», a indiqué le Pr Heikel. Et d'ajouter : «Les partenariats public-privé doivent s'intensifier pour répondre à la demande». Par ailleurs, ce dernier a insisté sur le fait que le confinement n'est pas une mesure pour stopper la pandémie. «Le confinement est une mesure transitoire d'urgence pour freiner la propagation du virus dans une population le temps de trouver des solutions. Avec le déconfinement, une partie de la population n'a pas respecté les mesures barrières, en l'occurrence la distanciation physique. Et par conséquent, on s'est retrouvé avec de plus en plus de malades symptomatiques et de plus en plus de malades dans un état grave. La létalité au Maroc en chiffre brut a augmenté et non pas en pourcentage où elle reste inférieure à 2%. Aujourd'hui notre système de santé est débordé». Dans le contexte actuel, et jusqu'à à ce qu'un vaccin à visée thérapeutique soit disponible, le Maroc doit se préparer sans cesse à vivre avec ce virus et à réduire ses conséquences sur la santé des populations, malgré toutes les incertitudes qui l'accompagnent. «Cette pandémie doit être affrontée à l'échelle collective. On doit tirer les leçons des épidémies passées et des réponses qui y ont été apportées, dans tous les aspects de la santé publique : surveillance, accès universel à la prévention et aux soins, amélioration des conditions d'hébergement des patients, renforcement des prestations de santé primaires, leadership institutionnel global, mobilisation sociale, attention redoublée aux inégalités sociales de santé, coordination des acteurs à l'échelle régionale, nationale et locale», a noté en substance Chakib Nejjari. Pour sa part, Maryam Bigdeli, représentante de l'OMS au Maroc, a affirmé que «l'impact de la Covid-19 a montré des faiblesses structurelles sur le système de santé qui existaient déjà. Le coronavirus a montré la pénurie des ressources humaines, le sous-financement des systèmes de santé, le problème de la gestion des stocks des médicaments, des chaînes d'approvisionnement des médicaments...». De premiers vaccins disponibles en 2021 L'OMS milite pour un vaccin à un prix équitable pour tous, le Maroc en fait d'ailleurs partie. A travers la mise en place du mécanisme Covax, il s'agit d'obtenir suffisamment de doses de vaccins pour protéger les populations les plus vulnérables, comme les professionnels de santé et les personnes âgées. «Si les essais cliniques continuent à ce rythme et s'avèrent concluants et prometteurs, on pourrait parvenir à un vaccin dans les prochains mois d'ici 2021. Néanmoins je mets en garde sur le fait que nous n'aurons pas un vaccin pour tout le monde en 2021. Le vaccin va certes nous sauver de cette pandémie et pas en 2021. D'abord parce qu'il y a énormément d'inconnues quant à son efficacité ainsi que sur l'immunité qu'il va procurer. D'autre part, on ne parviendra jamais à produire en 2021 suffisamment de doses pour la planète entière. Il va falloir privilégier et ce de façon équitable les populations les plus exposées et les plus vulnérables à la Covid-19 en ciblant les professionnels de santé et les populations vulnérables», précise la représentante de l'OMS au Maroc. De son côté, Noureddine Afouaiz, directeur général de GlaxoSmithKline Maroc (GSK) fait savoir que GSK était engagé avec Sanofi dans la conception d'un vaccin. «Les phases 1 et phase 2 des essais cliniques ont démarré il y a quelques jours avec 400 patients. Nous attendons les résultats d'ici la fin de l'année. S'ils s'avèrent positifs, la phase 3 démarrera. Si cette phase démontre l'efficacité et la bonne tolérance, nous serons alors en mesure de commercialiser et de mettre à les disposition des professionnels de santé un vaccin anti-Covid d'ici le deuxième semestre 2021».