Le groupe du PJD à la Chambre des représentants est en train de préparer une proposition d'amendement de la fameuse loi 03/03 contre le terrorisme. La garde à vue et les perquisitions des domiciles sont les deux principaux points de la réforme proposée. Deux ans environ après les attentats du 16 mai de Casablanca, le Parti de la Justice et du Développement (PJD) est en train de préparer une proposition d'amendement de la loi antiterroriste. Adoptée de manière quasi expéditive, le 29 mai 2003, deux semaines après les attentats, la loi 03/03 fait aujourd'hui l'objet d'une révision de la part du parti ayant subi les plus vives critiques concernant l'apparition du terrorisme au Maroc. Dans un entretien accordé à ALM, Habib Choubani, député du PJD et l'un des principaux rédacteurs de la proposition d'amendement, explique les raisons de cette initiative. "La pratique a montré les limites de cette loi antiterroriste. Dès qu'on ouvre une brèche, les services de sécurité concernés directement et indirectement en profitent pour abuser de leur pouvoir. Et les témoignages accablants des détenus sont nombreux pour illustrer cela", explique Habib Choubani. Et d'ajouter que "cet état des choses est vrai pour le Maroc comme dans bon nombre de pays". En fait, les amendements du groupe du PJD, qui seront présentés lors de l'actuelle session parlementaire, visent à permettre aux détenus d'être présentés le plus rapidement possible devant la justice. C'est pour cette raison que le premier aspect de cette proposition d'amendement concernera la garde-à-vue. La loi 03/03 prévoit une large extension de cette période où le suspect reste à la disposition de la police. D'une durée de 48 heures renouvelable une seule fois de 24 heures supplémentaires (dans le code pénal), la garde-à-vue passe à deux semaines, soit une durée de 144 heures renouvelable deux fois pour une durée de 96 heures chacune sur autorisation écrite du ministère public. "Sur ce point, nous estimons que les dispositions de notre code pénal sont largement suffisantes et qu'il est, par conséquent, inutile de rallonger la période de la garde à vue, surtout quand celle-ci est utilisée pour exercer des pressions psychologiques sur les détenus pour leur soutirer des aveux", poursuit Choubani. Deuxième disposition que le groupe du PJD souhaite modifier: les perquisitions aux domiciles des personnes soupçonnées d'activités terroristes. En effet, les perquisitions peuvent être effectuées hors des périodes prévues par la loi, en l'occurrence avant 6 heures et après 21 heures, y compris sans le consentement des propriétaires des lieux. D'autre part, le procureur du Roi peut, également, si les nécessités de l'enquête l'exigent, demander par écrit, au premier président de la Cour d'appel d'ordonner l'interception des communications téléphoniques ou des communications à distance, de les enregistrer, d'en prendre copie ou de les saisir lorsqu'il s'agit d'une infraction relative à l'atteinte de la sûreté de l'Etat et au terrorisme. Sur ce volet, Habib Choubani estime que les règles du droit pénal sont, là encore, totalement suffisante. En somme, le groupe du PJD, dont l'initiative n'a été concertée avec aucun autre groupe de la Chambre des représentants, semble vouloir vider la loi 03/03 de sa substance et pousser les sécuritaires à se contenter des dispositions légales classiques. Dans ce cas, pourquoi avoir voter pour la loi antiterroriste le 29 mai 2003? "La réponse est simple, explique Choubani: "Le contexte politique, extrêmement délicat, qui régnait à cette époque nous a obligés à voter pour le texte". Toutefois, le député pjdiste, qui occupait justement à cette époque le poste de président de la commission de la justice, de la législation et des droits de l'Homme de la Chambre des représentants (celle-là même qui a examiné le projet de loi 03/03), estime que le groupe a déjà exprimé ses réserves. "Nous avons enregistré, lors des travaux de la Commission, le refus de certaines dispositions du projet de loi 03/03, mais lors de la séance plénière, nous avons effectué un vote politique". Et pour cause, bon nombre de partis politiques exigeaient, au lendemain des attentats du 16 mai 2003, une dissolution pure et simple du PJD. Par son vote favorable, le PJD a donc voulu adresser un double message: "le premier était destiné aux adversaires farouches du PJD qui militaient pour l'interdiction de notre parti, et le deuxième message était adressé aux terroristes et à tous les fanatiques dont les actions sont catégoriquement rejetées par le PJD".