L'Assemblée générale ordinaire élective de la Confédération générale des entreprises du Maroc (CGEM) est programmée pour le vendredi 20 juin prochain. Trois candidats sont en lice pour prendre la tête d'une association patronale qui semble être l'une des grandes oubliées de ce vaste chantier appelé la mise à niveau. Au-delà de la personne appelée à devenir le patron des patrons, dont l'élection est prévue le vendredi 20 juin prochain, il y a l'institution. Une institution qui regroupe quelque 2.000 entreprises, mais qui évolue dans un environnement économique national constitué de 60 000 PME/PMI, de 400 grandes entreprises et de 350 000 professions libérales. Que représente donc la CGEM et dans l'intérêt de qui s'inscrivent ses actions des trois dernières années une réponse définitive semble difficile à trouver. En attendant, d'aucuns qualifient cette institution de clubs anglais, aussi bien élitiste que limité dans ses actions. Certains vont même jusqu'à l'accuser de clientélisme et de discrimination. C'est le cas de celui que l'on surnomme «l'enfant terrible» de la CGEM, Mourad Belmaâchi, candidat à la présidence de cette association et actuel président de l'association «alternative», Le Mouvement économique du Maroc (MEDUM). «Le patronat n'a pas la base, il ne peut pas se prévaloir d'être le défenseur de l'entreprise marocaine», affirme celui qui s'estime lésé par le manque de neutralité du secrétariat général de la CGEM, quant à la présentation de son dossier de candidature. Pour le président sortant, Hassan Chami, candidat pour un second mandat, les choses sont claires. Les différentes initiatives durant son mandat ont été entreprises sur la base des promesses qu'il avait faites lors de sa campagne en 2000. «J'avais promis de rajeunir, de féminiser et de sortir la CGEM de son caractère réactif pour embrasser une démarche pro-active dont la régionalisation est un axe prioritaire et avec une audience internationale. 7 femmes sont désormais membres du bureau de la CGEM. Créée en septembre 2002, l'association des femmes chefs d'entreprises du Maroc (AFEM) joue un rôle moteur dans la promotion de l'élément féminin dans l'action entrepreneuriale. Beaucoup de sang neuf a été attiré vers la CGEM. Ces jeunes cadres ont été tellement performants que l'Etat en a puisé quelques uns», résume M. Chami. Pour lui, l'action de la CGEM a été tournée vers davantage d'efficacité. Pour preuve, la participation, d'abord via les 10 questions aux centres de la création de l'emploi et ensuite les 60 mesures proposées au gouvernement, lors des élections législatives de 2002. «Beaucoup de ces mesures ont été reprises dans le programme présenté par le Premier ministre. À cela s'ajoutent les résultats du dialogue social, où les revendications du patronat ont été prises en compte telles que l'accord avec les syndicats sur les dispositions du code du travail, les licenciements abusifs, l'organisation du droit de grève, la barémisation des licenciements …», explique-t-il, relavant également les différentes actions de partenariat visant la promotion de la CGEM aux niveaux régional et international. Des performances qui n'en cachent pas moins des dysfonctionnements d'ordre structurel dont souffre la CGEM. Le revers de la médaille de l'actuelle CGEM, c'est paradoxalement son vice-président, Adnan Debbagh, également président de la Fédération PME/PMI qui le relatera. Pour lui, la CGEM peine de plus en plus à accompagner l'évolution de l'environnement international dont le Maroc est partie prenante. Un environnement caractérisé par l'Accord d'Association conclu entre le Maroc et l'U.E et l'Accord de libre-échange avec les Etats-Unis. « Alors que des avancées remarquables ont été enregistrées sur le plan politique, préalable nécessaire à toute association avec ces deux entités économiques, la mise à niveau de l'économie enregistre un retard notable », souligne M. Debbagh. La CGEM, quant à elle, demeure une «organisation traditionnelle, qui porte, certes, la parole des entreprises et joue son rôle de force de proposition mais qui peine à s'élargir et accroître sa représentativité, à élaborer des propositions claires, à améliorer l'image de l'entreprise et à s'intégrer dans la société. Elle est isolée», argumente-t-il. Le résultat en est que la société commence à regarder l'entreprise avec une certaine distanciation, voire avec suspicion. Pour lui, une nouvelle approche susceptible de porter la CGEM dans une optique fédératrice qui accompagne et stimule le changement, la modernisation et la création de l'entreprise s'impose. D'où son programme, axé sur trois principaux éléments. Il s'agit de la nécessité d'accroître la cadence de la mise à niveau de l'économie par la consolidation et le développement des acquis, tous secteurs confondus, le développement de l'espace comme opportunité d'investissement -comme cela a été fait pour le tourisme- à travers la régionalisation et une meilleure synergie entre les PME et les grandes entreprises. Un programme qui s'inscrit dans une logique de rupture, contrairement à celui du président sortant qui prône la poursuite des efforts déjà entamés dans le cadre d'une stratégie 2003-2007 visant à mieux répondre plus aux besoins des entreprises et des investisseurs. M. Belmaâchi, quant à lui, prône, entre autres priorités, un rajeunissement de l'équipe dirigeante, une restructuration des instances décisionnelles, une répartition plus équitable de la masse salariale (au sein d'une association dont la direction s'accapare la part du lion des salaires) et le lancement d'une campagne nationale pour faire adhérer les dizaines de milliers d'entreprises, encore réticentes. Mais encore faut-il qu'on daigne prendre sa candidature au sérieux au sein d'un secrétariat général qui n'en finit pas de se réunir, à chaque fois qu'il appelle pour demander qu'on lui envoie les bilans comptables certifiés par le commissaire aux comptes, nécessaires à sa participation dans ces élections. A une semaine après le début de la campagne électorale.