Malgré ses récents efforts de médiation pour tenter de relancer le dialogue entre Israéliens et Palestiniens, l'administration américaine paraît impuissante devant le refus persistant de l'Etat hébreu d'appliquer le plan de paix. Le premier camouflet diplomatique essuyé par les Etats-Unis remonte à la visite de Colin Powell au Proche-Orient, il y a deux semaines. Le 11 mai, le secrétaire d'Etat américain avait rencontré le Premier ministre, Sharon, pour le pousser à appliquer la “feuille de route”. Celui-ci lui avait répondu qu'il n'était pas question d'accepter ce plan de paix dans sa teneur actuelle ! Le document, élaboré par Washington, l'Union européenne, l'ONU et la Russie, exige dans l'immédiat de l'Etat hébreu qu'il retire son armée des territoires palestiniens et qu'il gèle sa politique de colonisation… Ce que l'intéressé refuse alors qu'il a, pendant des mois, utilisé la publication de ce texte comme outil de pression sur les Palestiniens ! Son objectif étant la naissance d'un Etat palestinien d'ici 2005, le plan a incité le président Arafat à accepter la création du poste de Premier ministre, qui est revenu le 19 mars à Abou Mazen. Il a aussi délégué ses pouvoirs au profit du nouveau gouvernement. Engagée dans un processus de réformes démocratiques, l'Autorité a donc – non sans frictions – dû remplir une partie des prérogatives inscrites dans la “feuille de route” avant même sa parution, le 30 avril ! Depuis, le Premier ministre, Mahmoud Abbas, a réitéré sa volonté de démilitariser l'Intifada, autre exigence du plan de paix. Il devait d'ailleurs rencontrer des responsables du Hamas à Ghaza, jeudi soir, afin de persuader le mouvement de renoncer aux attentats anti-israéliens. Une entrevue qui intervient dans un climat de regain de tensions avec la série de cinq attaques kamikazes revendiquées en partie par le Hamas, de samedi à lundi dernier. Initiée par Abou Mazen, elle fait aussi suite à l'entretien téléphonique que celui-ci a eu mardi soir avec le président américain. George W. Bush lui avait alors demandé de faire plus pour lutter contre les actes terroristes, estimant que son interlocuteur était un réformateur qui oeuvrait réellement pour la paix. Quant à l'autre camp, celui des Israéliens, qu'a-t-il jusqu'à présent fait pour renouer le dialogue ? Tout en évoquant le bannissement pur et simple de Yasser Arafat, le gouvernement Sharon a fait d'Abou Mazen son interlocuteur «valable», une orientation officialisée par la rencontre des deux Premiers ministres le 17 mai. De cet entretien «historique», rien de concret n'est pourtant sorti. Au contraire, l'armée est toujours présente dans les territoires, et les punitions collectives maintenues. Jeudi encore, un enfant de 12 ans, Kamal Naouarda, a été très grièvement blessé à la tête par des tirs de soldats israéliens près de Jénine, dans le nord de la Cisjordanie. Mardi, le président Bush avait, quant à lui, appelé son allié pour le pousser à accepter la “feuille de route” alors qu'Ariel Sharon compte encore sur sa prochaine venue à la Maison Blanche pour changer la donne. Un tête-à-tête qui était prévu en début de semaine avant que le Premier ministre israélien ne le reporte pour «raisons de sécurité». Est-ce la vraie raison ? L'ambassadeur des Etats-Unis à Tel-Aviv, Dan Kurzer, a de nouveau appelé, jeudi, le cabinet Sharon à démanteler les points de colonisation sauvages, évalués à plus d'une centaine en Cisjordanie. Mais l'Etat hébreu préfère faire la sourde oreille. La vraie question est donc, aujourd'hui, de savoir jusqu'où la Maison Blanche est prête à aller pour sauver la paix…