Assirat Al Moustakim, Salafia Jihadia et Attakfir Wal Hijra font partie d'une même nébuleuse terroriste qui appelle à l'usage de la violence au nom de la religion. Les enquêtes des services de sécurité marocains ont prouvé l'existence de plusieurs connexions entre leurs membres. C'est officiel : les terroristes ayant perpétré les attentats du 16 mai à Casablanca font partie du groupuscule intégriste "Assirat Al Moustakim" (droit chemin). Ce mouvement, qui fait partie d'une nébuleuse dite "Salafia Jihadia" (Salafisme combattant), se caractérise par son appel à la violence et au combat (Jihad) pour le retour au modèle traditionnel de la société musulmane. Un objectif qui s'apparente très largement à celui affiché par la tendance d'Attakfir Wal Hijra (anathème et exil). L'ensemble de ces tendances intégristes prônant la violence était passée au premier plan de l'actualité nationale l'été dernier lorsque les services de sécurité ont pu démanteler les réseaux d'Assirat Al Moustakim, dirigé par le dénommé Miloudi Zakaria, l'arrestation de l'émir Takfiriste Youssef Fikri qui a perpétré plusieurs crimes au nom de la religion, et la découverte du mouvement de la Salafia Jihadia dirigé par les deux prêcheurs, Hassan Kettani et Abdelwahab Rafiki, dit Abou Hafss. Ces groupes, même s'ils agissent sous de dénominations différentes et prétendent se distinguer par certaines divergences idéologiques, plusieurs connections existent entre leurs dirigeants. Des relations qui ont été prouvées par les services de sécurité marocains ayant pu mettre la lumière sur plusieurs aspects de liens, voire de coopération, entre leurs différents émirs. Quels sont donc les groupuscules qui forment cette nébuleuse terroriste marocaine et que sait-on à propos de leurs leaders? En avril 2002, le dénommé Miloudi Zakaria, était arrêté à Casablanca par la police judiciaire après avoir été impliqué dans le meurtre de Fouad Al Kardoudi. Un délinquant du quartier Sidi Moumen que les adeptes de "l'émir Zakaria" avaient avoué avoir exécuté par lapidation jusqu'à la mort et reconnu leur appartenance au mouvement dit "Assirat Al Moustakim". Ils furent condamnés par la Chambre criminelle près la Cour d'appel de Casablanca à des peines d'emprisonnement allant de vingt ans de réclusion criminelle à quatre ans de prison ferme pour les membres de la bande. Pour sa part, Zakaria, qui n'a pas participé à l'exécution, fut condamné à une année de prison ferme. Après avoir purgé sa peine, et juste au moment où il s'apprêtait à quitter la prison civile de Oukacha à Casablanca, les services de police découvrent son implication dans un autre dossier à savoir l'affaire dite de la Salafia Jihadia de Casablanca. Il est à nouveau placé en détention dans le cadre de l'instruction de cette affaire. C'est cette relation existant entre Miloudi Zakaria et l'affaire Damir qui mettra la lumière sur l'existence d'une corrélation idéologique et opérationnelle entre Assirat Al Moustakim et Salafia Jihadia. Ce dossier remonte au mois de juin 2002, lorsque la brigade nationale de la police judiciaire met la main sur le dénommé Youssef Fikri. Une arrestation qui allait mettre la lumière sur le parcours criminel d'un soi-disant émir ayant pu former un groupe d'assassins et de voleurs prétendant agir au nom de la religion. Ils commettent ainsi plusieurs assassinats, agressions et vols sur tout le territoire national. Des crimes dont Fikri est fier comme il l'a avoué, il y a quelques semaines, dans une lettre ouverte qu'il a adressée à l'opinion publique et où il relate tous les crimes qu'il a perpétrés contre des innocents. C'est dans le cadre de la même enquête que la police découvre l'existence d'une cellule de la Salafia Jihadia dirigée par un autre émir, ami et allié de Fikri, il s'agit de Mohamed Damir. Impliqué dans l'affaire de la Salafia Jihadia, ce dernier fait partie des quelque quarante accusés de ce dossier, dont Youssef Fikri et Miloudi Zakaria. Une affaire qui est actuellement en cours d'instruction devant la Chambre criminelle près la Cour d'appel de Casablanca. Outre ce côté actif de l'action terroriste que représentent Miloudi, Fikri, Damir et les membres de leurs groupuscules, il existe un aspect idéologique justifiant le recours à la violence. Celui-ci est assuré par des prêcheurs adoptant l'idéologie de la Salafia Jihadia qui estime que la société est impie et appelle à lutter contre ses symboles par le Jihad. C'est dans ce cadre que l'on peut classer les prédicateurs poursuivis par la justice dans le cadre de l'affaire du camp d'entraînement qu'ils avaient organisé dans la forêt de Maâmora à savoir Hassan Kettani et Mohamed Abdelwahab Rafiki alias Abou Hafss. Condamné à trois mois de prison par la Cour d'appel de Fès pour avoir approuvé les actes terroristes de Ben Laden, Abou Hafss est l'auteur de la fatwa autorisant les expéditions punitives contre les impies qui ne respectent pas les règles de la Chariâ et offensent par leurs comportements la dignité des Musulmans. C'est l'une des règles principales de la Salafia Jihadia que les adeptes appliquent au moment d'exécuter leurs actes criminels. Le Jihad pour lui est une affaire de famille. En fait, il est le fils d'Ahmed Rafiki, alias Abou Houdaïfa, un vétéran de l'Afghanistan où il a exercé le métier d'infirmier dans les camps de Ben Laden où il était connu comme "docteur" Abou Houdaïfa. Outre ces deux prédicateurs considérés comme des leaders de la Salafia Jihadia, il existe d'autres prêcheurs que l'on considère comme des dirigeants d'Attakfir Wal Hijra et qui eux aussi appellent à l'usage de la violence. Cette tendance se manifeste dans leurs prêches et leurs écrits qui ne prêtent à aucune confusion quant à leur appel à l'usage de la violence. Les plus célèbres demeurent Mohamed Fizazi de Tanger, Omar Hamdouchi de Tétouan et Abdelkrim Chadili alias Abou Oubaïda de Casablanca. Une lecture dans l'ensemble des différents dossiers de la Salafia Jihadia, d'Assirat Al Moustakim et d'Attakfir Wal Hijra révèle qu'elles font toutes partie d'une nébuleuse terroriste ayant des connexions entre toutes ses composantes et qui va crescendo puisqu'elle évolue de plus en plus en ce qui concerne l'usage de la violence dans la forme et dans le fond.