Le conseil vient de présenter ses conclusions et recommandations relatives à ce phénomène d'expression En établissant son rapport 2018 portant sur « les nouvelles formes de protestation au Maroc», le Conseil économique, social et environnemental (CESE) ne fait pas, selon son président Ahmed Réda Chami, de «chasse aux sorcières». «Dans ce rapport, il ne s'agit pas de voir qui maîtrise la source de la communication sur les réseaux sociaux. Notre objectif est que ce débat public intègre les espaces institutionnels», tranche-t-il. Pour lui, il est question de rechercher les raisons objectives de ce nouveau phénomène d'expression et de protestation dans l'espace virtuel et de son impact sur l'espace public ainsi que la vie socio-économique. «De même, les recommandations de ce rapport sont de nature à approfondir la compréhension de ces nouvelles formes», détaille-t-il en rappelant que la première partie du rapport porte sur l'évolution de la situation économique, sociale et environnementale, marquée par des «points de vigilance». La troisième partie étant consacrée au bilan annuel des activités du conseil. Concernant les nouvelles formes de protestation, le Conseil fait ressortir plusieurs traits. Les parties prenantes appelées à se réinventer C'est sur les réseaux sociaux que la protestation a pris de nouvelles formes. Ces espaces ont d'ailleurs incité le CESE à en faire l'objet de ce rapport. Dans ce sens, le Conseil précise que le choix de ce thème a été motivé par la multiplication récente des nouvelles formes de contestation et d'expression citoyennes caractérisées par le recours accru des citoyens aux réseaux sociaux leur procurant anonymat et instantanéité des échanges. «L'absence de passage par les corps intermédiaires traditionnels en a également constitué l'un des traits dominants», explicite le conseil. Cependant, ces corps intermédiaires demeurent indispensables au système démocratique, notamment par rapport à la question de disposer d'un interlocuteur responsable et comptable des revendications exprimées. «Dans ce sens, toutes les parties prenantes, sont appelées à se réinventer, dans le cadre des rôles qui leur sont dévolus par la Constitution en revoyant leurs structures, méthodes et instruments de travail, ainsi que leurs canaux de communication», ajoute le Conseil. Pour cette structure, le contenu du discours de ces parties gagnerait aussi à être adapté aux besoins et aspirations des citoyens, plus connectés et plus exigeants en termes de transparence, de reddition des comptes et d'implication dans la chose publique, en portant une attention particulière aux jeunes. Elargir la participation citoyenne De plus, les nouvelles formes de protestation doivent, selon le Conseil, être «appréhendées sous l'angle de l'élargissement de la participation citoyenne dans la gestion de la chose publique». De fait, la Constitution marocaine prévoit 3 grands types de mécanismes participatifs aux niveaux national et territorial, à savoir les instances de concertation, l'initiative législative citoyenne et le droit de pétition. Ceci étant, les conditions d'exercice de ces mécanismes sont extrêmement exigeantes et leur mise en place est très lourde. Ainsi, il y a lieu, selon le Conseil, de renforcer les mécanismes de démocratie participative concomitamment à une consolidation de la démocratie représentative qui se doit de conserver son rôle. Des pistes sont, selon le Conseil, à retenir dans ce cadre. Il s'agit d'accélérer la mise en place et garantir l'effectivité des mécanismes de la démocratie participative. Il est également question de lever l'appréhension de la démocratie participative par les pouvoirs publics et la société civile en veillant à faire converger les perceptions, voire de consolider la démocratie représentative. Préconisations Dans son rapport, le CESE recommande, pour accélérer et garantir l'effectivité des mécanismes de la démocratie participative, de mettre en place des Conseils consultatifs récemment créés. Il préconise également d'utiliser le numérique comme levier innovateur et facilitateur de la démocratie participative. Pour lever l'appréhension de la démocratie participative par les pouvoirs publics et la société civile, le conseil recommande, entre autres, d'intégrer les acteurs des nouvelles dynamiques (jeunes, blogueurs, faiseurs d'opinion,…) au sein des instances de concertation nationales et territoriales. Il préconise également dans ce sens de mettre en place un cadre juridique approprié pour encourager les associations des quartiers et « des douars» à s'organiser en réseaux et les former/sensibiliser sur leurs prérogatives et les nouvelles méthodes de participation, dans le cadre de la mise en œuvre de l'article 116 de la loi organique relative aux régions. Le Conseil recommande même de créer un observatoire national de promotion, de suivi et d'évaluation des actions de la démocratie participative.