Ahmed Rhaili est un nom indissociable de la pratique du cyclisme des années 70 et 80 au Maroc. Aux côtés des Nejjari, Affandi et autres Benbouila, il a fait les beaux jours de la petite chez nous. C'est un homme mûr qui porte un regard à la fois critique et confiant sur cette discipline. Qui, dans le milieu du cyclisme, ne connaît pas Ahmed Rhaili ? le nom de ce coureur infatigable, élégant au style volontaire, surtout dans les ascensions où il s'est souvent révélé un redoutable grimpeur, est encore présent dans les mémoires. Des titres, il en a ramassé beaucoup : champion du Maroc juniors en 1973, champion maghrébin dans le «contre la montre» l'année suivante, médaillé d'or des Jeux Panarabes en Syrie en 1976, médaillé d'or du championnat du monde arabe en Arabie Saoudite en 1981 et en Algérie en 1984. Il a disputé un nombre impressionnant d'épreuves internationales comme la Course de la Paix, le Tour de l'Avenir, les Spartakiades de Moscou en 1979 et les Jeux Olympiques de Los Angeles en 1984. C'est dire si le bonhomme en connaît un rayon sur la bicyclette… Après avoir pris une retraite méritée, il s'est consacré à la carrière d'entraîneur. Après avoir coaché le club saoudien de Madar, il s'est occupé de la sélection nationale saoudienne, puis le club libyen d'Al Madina. De 1995 à 2002, il prendra en charge l'équipe nationale du Maroc. Et à cet égard, ses anciens poulains gardent le souvenir d'un «homme affable et modeste, privilégiant la discussion et constamment à l'écoute des coureurs». De plus, il n'est pas peu fier de son poulain Abdelaâti Saâdoune de Lafarge qui a remporté le Tour du Burkina Faso. Pour l'heure, celui qui a connu toutes les joies du cyclisme, jette, à 45 ans, un regard circonspect et plein de nostalgie sur cette discipline au Maroc. Et après, l'Assemblée générale extraordinaire qui a porté Lahcen Naciri à la tête de la Fédération royale marocaine de Cyclisme (FRMC), il espère que cette fois-ci, le départ sera donné vraiment pour de bon. Le vieux routier qu'il est déplore que ce bureau ne se soit constitué qu'en février. «La saison s'arrête en juillet, les coureurs ne vont donc avoir qu'une saison de quatre mois, alors qu'auparavant elle s'étendait de décembre à juillet». Et, après, on ne pense plus qu'aux prochaines élections… «Pour améliorer leur niveau, les coureurs doivent participer davantage aux réunions internationales et disposer d'un bon calendrier national. Sinon, c'est la mise à niveau par le bas !», souligne-t-il. Le père de Mohcine Rhaili, 21 ans, qui a repris le flambeau au club Lafarge, insiste pour que les gens qui ont été élus doivent «œuvrer dans l'intérêt du cyclisme et oublier les conflits personnels». Une petite phrase qui en dit long tant cette Fédération a connu de déchirements et une longue période d'incertitudes, qui aura duré la bagatelle d'une dizaine d'années ! A cet égard, l'ancien champion propose l'idée, somme toute, assez intéressante, de la tenue d'une journée d'études qui serait consacrée au cyclisme national. Les Etats généraux de la petite reine au Maroc, en somme. Et où l'intérêt de cette discipline qu'il chérit tant et à laquelle il s'est consacré corps et âme devrait avoir la primauté sur toute autre considération. Si le Tour du Maroc cycliste a disparu, c'est parce que, outre les problèmes déjà exposés, il y a également eu une crise de confiance entre les dirigeants et les sponsors. A la question de savoir pourquoi les anciens champions ne se manifestent-ils pas plus pour prendre en main les destinées de cette discipline, et notamment au niveau des clubs, Rhaili répond, désabusé, qu'il s'agit d'une «question de moyens» et que les ex-gloires, qui connaissent généralement bien les maux dont souffre cette discipline, ne disposent généralement pas des moyens de leurs ambitions. On pourrait lui répondre que ce n'est pas là un problème spécifique au cyclisme. Pour l'heure, Rhaili, qui a effectué l'année dernière un périple Casablanca-Laâyoune, en compagnie de son épouse Karima Salahddine, compte remettre cela avec un parcours qui mènera le couple de Casablanca à Tripoli, en passant par Alger et Tunis. Faut-il s'en étonner ? Rhaili a épousé la première femme-entraîneur de cyclisme au Maroc, qui se trouve être la fille de l'ex-champion Abdelkader Salahddine, alias Abdelkader Ben Saïd. A 21 ans leur fils Mohcine est un jeune sociétaire prometteur de Lafarge. On l'aura compris, chez les Rhaili, on a le vélo rivé à l'âme.