Le Conseil de la concurrence tient son premier séminaire national depuis sa réactivation Le Conseil de la concurrence a organisé, hier à Rabat, en partenariat avec la Banque mondiale, son premier séminaire national depuis sa réactivation. Organisée sous le thème «La dynamisation de l'écosystème concurrentiel dans un Maroc ouvert», cette rencontre vise à placer l'écosystème concurrentiel dans le cadre des politiques publiques en incitant le gouvernement à prendre en considération les éléments rentrant dans le cadre de la concurrence. «C'est une occasion aussi pour examiner les relations à établir entre les autorités nationales de régulation et le Conseil de la concurrence dans le cadre de l'interdépendance des missions et de la convergence des objectifs pour terminer par un examen partagé de ce que peut jouer l'ensemble des acteurs de l'écosystème concurrentiel dans la construction d'un nouveau modèle de développement à bâtir pour le Maroc dans les décennies à venir», a indiqué à ce sujet Driss Guerraoui, président du Conseil de la concurrence. Dans ce contexte, M. Guerraoui a cité un ensemble d'objectifs stratégiques que le Conseil de la concurrence considère comme prioritaires. Parmi lesquels, protéger le pouvoir d'achat des consommateurs et leurs droits économiques et sociaux dans le marché, participer à la réalisation des conditions du climat d'affaires convenable pour renforcer l'attractivité de l'économie nationale et faire exploser les énergies pour l'ensemble des acteurs de la société, notamment les jeunes entrepreneurs. Pour sa part, Marie Francoise Marie Nelly, directrice du département Maghreb et Malte, Moyen-Orient et Afrique du Nord, groupe de la Banque mondiale, a saisi l'occasion pour féliciter le Maroc d'être passé du 97e rang en 2012 au 60e actuellement au cours des sept dernières années. Dans ce sens, elle a noté que «c'est un tournant historique dans son développement. Il a la possibilité de capitaliser sur les réformes des investissements engagés, notamment au niveau des infrastructures dans le contexte international pour porter le pays vers un nouveau modèle de développement». Mais pour que cela se fasse, la représentante de la Banque mondiale a recommandé qu'«il faut libérer les énergies et le potentiel du secteur privé en particulier celui des jeunes, ainsi que mettre en place un cadre concurrentiel dynamique et moderne qui fait en sorte que les règles de la concurrence soit appliquées». «Le Conseil est là et nous pensons que c'est le moment de passer à la vitesse supérieure pour que le Maroc puisse profiter de ce potentiel qu'il a aujourd'hui en particulier les jeunes qui sont à la recherche d'emploi». Dans le même contexte, Ahmed Réda Chami, président du Conseil économique, social et environnemental a considéré que l'écosystème concurrentiel au Maroc est un sujet capital pour notre pays. A ce sujet, il a rappelé les réalisations et a appelé à réfléchir sur les voies possibles pour la construction d'un écosystème concurrentiel sain qui favorise une croissance forte, profite à l'ensemble des catégories socio-économiques et garantit une équité entre les acteurs économiques. «Force est de constater que le modèle de développement actuel n'est plus en mesure de garantir une dynamique économique soutenue, à même de créer de la richesse et de l'emploi. D'une part en effet, la croissance économique demeure faible avec un taux moyen de l'ordre de 3,6% sur la période 2008-2018. D'autre part, cette croissance, qui est toujours tributaire des aléas climatiques, ne crée pas suffisamment d'emplois et ne favorise ni l'inclusion ni la réduction des inégalités», dit-il. Selon lui, cette situation menace la cohésion sociale et favorise la montée de formes de défiance favorisante des tensions sociales comme ce fut le cas ces dernières années (mouvements de protestation d'Al Hoceima, Jerada, boycott…). M. Chami a mentionné que plusieurs fragilités structurelles concourent à un tel état de fait. «Ces faiblesses qui caractérisent l'économie marocaine obèrent sa capacité à réaliser un véritable décollage économique. Elles favorisent de fait l'inefficience, la faible valeur ajoutée et contribuent à la persistance des inégalités sociales et territoriales». Et d'ajouter que les faiblesses du modèle de croissance au niveau macroéconomique «se reflètent en particulier au niveau de l'entreprise dont la compétitivité reste insuffisante. Ainsi, la part des secteurs à forte valeur ajoutée, comme l'industrie et les technologies de l'information et de la communication (TIC), ne dépasse guère 10% du total des entreprises». Le président du CESE a cité plusieurs facteurs structurels concourant à un tel état de fait. Il y a lieu de citer les orientations politiques publiques, notamment en matière économique. Celles-ci manquent selon ses dires, de lisibilité, de convergence et de cohérence d'ensemble, et se caractérisent par une inefficiente dans la mise en œuvre des réformes engagées. De plus, le système de soutien aux entreprises demeure insuffisant en termes de volumes et de diversité des instruments. «Il pâtit de l'inefficacité et la lenteur des modalités d'engagement». Ensuite, l'existence de secteurs protégés, de privilèges et agréments qui encouragent le comportement rentier au détriment de l'efficience économique, de l'innovation et de la prise de risque, une forte concentration sectorielle, pouvant inciter certaines grandes sociétés à adopter des pratiques anticoncurrentielles prohibées (abus de position dominante, barrières à l'entrée, ententes de prix, etc.). Selon lui, créer une croissance forte, réduire les inégalités et redistribuer les richesses passent nécessairement par l'élimination de l'emprise des rentes de situation et la promotion de la concurrence saine pour promouvoir l'efficience économique et l'équité sociale. L'atteinte de cet objectif repose, selon lui, sur quatre leviers d'actions majeurs. Premièrement : instauration d'une politique fiscale juste et équitable ; deuxièmement: amélioration du cadre de régulation des marchés en vue de promouvoir une concurrence saine entre acteurs économiques. «Cela consisterait à mettre à plat les dérogations et les niches rentières, pour n'en garder, à la sortie, que celles qui répondent à des critères prédéfinis témoignant d'une utilité économique et/ou sociale avérée et mesurable objectivement», explique-t-il. Troisièmement, renforcement de la protection des droits des consommateurs, et quatrièmement l'assurance à l'accès à l'information et l'aide à la décision.