Lundi, Ariel Sharon a finalement conclu un accord avec le parti centriste laïc Shinouï qui rejoindra le nouveau gouvernement aux côtés du Likoud et du Parti national religieux. Un cocktail peu convaincant. Lundi, Ariel Sharon aura au moins réussi à éviter le pire en trouvant un accord avec le Shinouï, qui lui évite d'avoir automatiquement recours aux partis ultra-orthodoxes siégeant au Parlement pour faire passer ses projets. L'entrée de ce parti, arrivé troisième aux récentes législatives anticipées du 28 janvier, est d'ailleurs originale à plus d'un titre. Avec 15 députés à la Knesset, le mouvement laïc fait une entrée en force devant l'autre principal allié du Likoud, l'ultra-nationaliste PRN (six sièges). « Sharon nous a trahis ! Il forme un cabinet de poubelles », s'est déjà insurgé lundi le leader du Shass, le rabbin Ovadia Yossef. Il faut rappeler que le chef du Shinouï, Yossef Tommy Lapid, a plusieurs fois promis de « sauver le judaïsme des ultra-orthodoxes » qui, en échange de leur soutien à Ariel Sharon, ont obtenu certains privilèges comme l'exemption au service militaire. Une donne qui devrait changer avec l'octroi au parti centriste des ministères de la Justice, de l'Intérieur, des Infrastructures nationales, de l'Environnement, et des Technologies et Sciences. Sans compter la nomination au poste de vice-Premier ministre de M. Lapid. Reste les divisions internes qui se profilent déjà au sein du tout nouveau cabinet israélien. Le Parti national religieux, qui milite pour la colonisation des terres occupées par Israël en 1967, et le Shinouï ont des vues opposées sur la plupart des sujets, et en premier lieu la question palestinienne, un conflit qui divise par ailleurs le Likoud lui-même. L'accord qu'Ariel Sharon a conclu dimanche avec le PNR prévoit par exemple que les colonies juives dans les territoires occupés soient agrandies « pour répondre à la croissance naturelle » de ces populations. Le parti centriste s'est par contre déclaré pour le démantèlement de ces colonies, une controverse qui a déjà entraîné l'éclatement du précédent gouvernement lors du départ des Travaillistes en septembre 2002. Et qui pourrait se répéter… Le PRN s'est par ailleurs toujours opposé à la création d'un Etat palestinien alors que le Shinouï se dit favorable à l'évacuation des territoires occupés dans le cadre d'un accord de paix. A condition toutefois que Yasser Arafat, qu'il qualifie de « terroriste », soit écarté. Une position qui semble rejoindre le camp du Likoud mené par Ariel Sharon face aux « faucons » de Benjamin Netanyahu sensiblement alignés sur les positions du PRN. La question du conflit israélo-palestinien a par ailleurs été évoquée lundi par Yossef Paritzky, un responsable du Shinouï, qui a assuré que « la coalition gouvernementale en cours de formation demeure clairement engagée dans le processus de paix avec les Palestiniens ». Il a cependant concédé que la création d'un Etat palestinien ne serait « pas spécifiquement mentionnée dans le programme gouvernemental », ce que les Travaillistes ont reproché à Ariel Sharon dimanche en rompant les négociations. Selon M. Paritzky, « il est évident que le gouvernement restera tenu par les engagements internationaux d'Israël, notamment les accords d'Oslo » de 1993, sur l'autonomie palestinienne. Des accords que M. Sharon avait dernièrement rendus caduques et qui n'empêchent en rien Israël de poursuivre sa politique répressive à l'égard de la population civile. Multipliant les incursions dans la Bande de Ghaza et en Cisjordanie, l'armée de l'Etat hébreu a déjà tué une quarantaine de Palestiniens en moins d'une semaine.