La commission de la justice, de la législation et des droits de l'Homme à la Chambre des représentants entamera, à partir du 19 février l'examen du projet de loi N 03/03 relatif à la lutte contre le terrorisme. Les travaux de la réunion de mercredi prochain débuteront à 10H00, précise un communiqué de cette commission. Ce projet de loi entre dans le cadre de l'adaptation de la législation marocaine à la nécessaire lutte contre le terrorisme et de la révision du Code de procédure pénale, jugé assez obsolète. Ainsi, le Maroc, à l'image d'autres pays visés par la montée terroriste, entend se protéger. Le texte soumis au Parlement définit d'abord les actes terroristes comme « une entreprise individuelle ou collective ayant pour but de troubler l'ordre public par l'intimidation, la force, la violence, la frayeur ou la terreur » destinée à porter atteinte « à la sûreté intérieure ou extérieure de l'Etat » ou « à la vie des personnes, ou à leurs libertés, par l'enlèvement ou la séquestration ». La définition est étendue aussi à la contrefaçon ou la falsification des monnaies, la destruction ou la dégradation de moyens de transport, de communication. Le vol et l'extorsion des biens sont également du domaine du terrorisme, tel que le prévoit le projet de loi. Le faux et la falsification de chèques sont aussi considérés comme des délits terroristes. «La propagande, la publicité ou l'apologie» d'un acte terroriste constitue aussi une infraction de terrorisme. Cette définition, prise au sens très large, soulève l'inquiétude des juristes et défenseurs des droits de l'homme, qui craignent que cette extension ne soit un prétexte pour museler les libertés. Même l'Union européenne n'est pas allée aussi loin que le Maroc, en matière de définition. Elle s'est contentée de cerner la problématique en ces termes : le délit «doit porter gravement atteinte à un pays ou une organisation et être commis intentionnellement dans le but d'intimider une population, de contraindre les pouvoirs publics à des actions ou de déstabiliser ou détruire les structures d'un pays ». Aussi, certains juristes estiment que si la définition marocaine est adoptée, elle risque de créer une confusion au niveau de la charge politique et du contexte marocain. Autrement dit, il ne faudra pas qu'une définition élargie réduise la liberté politique et les droits universels de l'homme. D'autres reproches sont faits au texte en discussion. Ils concernent certains délits qui relèvent du pénal que le projet veut hisser au rang d'actes terroristes. Il en va du faux en matière de monnaie et de chèques, de bris de propriété d'autrui. Plus, la définition proposée peut faire assimiler un acte de violence au terrorisme. La contrefaçon et la falsification, c'est connu, font partie des délits de vol et d'escroquerie mais ne sont pas toujours en liaison avec des opérations de terrorisme. La nuance est de taille. De même, la délation à laquelle appelle le texte semble tirée par les cheveux. Une campagne d'explication et d'éducation régulière peut suffire pour conforter l'arsenal. Car, à n'importe quel moment, l'on pourra ressortir les textes pour crier au terrorisme. La non-dénonciation ne peut faire du Marocain un criminel ou un terroriste. La durée de la détention préventive est l'autre aspect «négatif» de ce projet de loi. Ce dernier la fixe à' cent quarante-quatre heures, renouvelables deux fois pour une durée de quatre-vingt-seize heures chaque fois. Soit un total de 14 jours. Une durée jugée « excessive» et qui peut être généralisée à d'autres délits, confusion oblige. Ce qui pose la question de l'équilibre entre «la protection de la sécurité publique et l'image rayonnante de la démocratie et des libertés». Il faudra surtout privilégier le champ de l'investigation à la hâte de l'instruction basée sur des doutes.