Maroc-Algérie. Mohamed Ziane, président du Parti marocain libéral, aborde, dans cet entretien, les rapports entre Alger et Rabat. Notamment la question du Sahara marocain et des frontières entre les deux pays qui demeurent fermées. ALM : Dans tout conflit, souvent il est demandé aux parties de faire des concessions mutuelles. Qu'en est-il du cas Algérie-Maroc ? Mohamed Ziane : Le problème ne me semble pas se concevoir en termes de concessions, mais il fautplutôt se dire ouvertement les quatre vérités au lieu de continuer à croire à l'efficacité des pratiques du passé. Feu S.M. Hassan II a eu l'intelligence de dépasser le problème frontalier par une acceptation du statut existant, démontrant ainsi sa volonté de surpasser les susceptibilités pour aborder l'essentiel. L'Algérie, par contre, est restée figée sur ses positions classiques et continue à traiter ses relations avec le Maroc dans une optique de politique intérieure. Concrètement, pour la question du Sahara marocain… Pour les Algériens, le Maroc passe pour être un pays expansionniste et rétrograde, sans principes en matière de politique étrangère, alors que la vérité est justement le contraire. C'est feu Hassan II qui a accepté de respecter le principe d'autodétermination des peuples, malgré la solidité de nos droits sur nos territoires, alors que l'Algérie faisait reconnaître la RASD dans le Tiers-monde au lieu d'attendre le résultat du référendum. Par cette attitude, elle prouve que, dans la pratique, le droit des peuples à disposer d'eux-mêmes est totalement étranger à sa politique étrangère. Que dire de la fermeture des frontières ? surtout que les deux pays et les populations limitrophes en pâtissent… Y a-t-il des perspectives de retour à un flux humain et mercantile normaux? Par ailleurs, le Maroc a fermé ses frontières avec l'Algérie au motif d'empêcher l'entrée des terroristes sur son sol. Or la vérité est ailleurs. Car c'est par la frontière avec l'Espagne que les terroristes algériens sont entrés au Maroc et c'est en France qu'ils se sont procuré des armes et où ils se sont entraînés. L'Algérie n'est vraiment pour rien. C'est pourquoi je dis que la fermeture de la frontière avec l'Algérie est une mesure en contradiction avec la réalité des faits vécus. Le retour à la sagesse dicte la réouverture des frontières. Cela favoriserait le dégel politique. Dans tout l'univers, les zones ancrées entre deux frontières sont les plus prospères et, nulle part dans le monde, on ne considère les frontières comme de vils contrebandiers à abattre ! Au contraire, les Etats riverains négocient des accords bilatéraux reconnaissant des privilèges et des mesures exceptionnelles pour les ressortissants, les marchandises, et les flux humains ou financiers des zones limitrophes de part et d'autre d'une frontière. Il suffirait que les deux pays s'attablent et décident d'appliquer ce qui s'applique de par le monde et d'accepter ce que l'humanité a accepté partout et depuis toujours pour les habitants des zones frontalières. On ne demande à personne d'inventer le fil à couper le beurre! Le Parti marocain libéral a été le seul mouvement politique à inscrire l'ouverture des frontières avec l'Algérie dans son combat. Car, au nom d'une vision sécuritaire, c'est le quotidien des deux populations qui en pâtit.