Mardi, le ministre français de l'Intérieur a jugé « très sérieux » le coup de filet mené la veille en banlieue parisienne. Les trois islamistes arrêtés sont soupçonnés d'avoir préparé un attentat de nature chimique à Paris. «C'est très sérieux, beaucoup des informations données par la presse sont vraies. Quand on trouve des gens qui ont ce matériel, c'est forcément qu'on a bien fait de les arrêter», a estimé mardi le ministre français de l'Intérieur, répondant aux questions sur l'affaire des trois islamistes arrêtés la veille. Plus que leur interpellation, c'est en fait la découverte, qu'ont par la suite fait les policiers en perquisitionnant leur domicile, qui est inquiétante : des produits chimiques. Nicolas Sarkozy a précisé à ce sujet que les analyses des produits saisis étaient en cours, mais il est resté plus vague sur les projets d'attentat de ces hommes. «Disons qu'il valait mieux les arrêter avant qu'après», a, malgré tout, indiqué le ministre de l'Intérieur tandis que, selon les médias, notamment la radio Europe 1, «les enquêteurs ont acquis la conviction qu'un attentat chimique ou bactériologique» était en préparation. L'arrestation, lundi matin à la Courneuve, dans la banlieue nord de la capitale, de trois islamistes - deux Algériens et un Franco-marocain - avait permis aux policiers du contre-espionnage de découvrir des flacons et des bouteilles contenant des liquides et des poudres ainsi que des formules chimiques et des bouteilles de gaz. Ils ont également trouvé de la documentation islamiste, les sommes de 5.000 dollars et 20.000 Euros, ainsi qu'une tenue vestimentaire de protection «NBC» (nucléaire-bactériologique-chimique) dans leurs domiciles. Par ailleurs, leur leader présumé, un des deux Algériens, âgé de 29 ans, est soupçonné de liens avec son compatriote Rabah Kadri, dit «Toufik». Cet homme a été inculpé avec trois autres personnes, le mois dernier en Grande-Bretagne, pour préparation d'attentat chimique contre le métro de Londres... Il fait également l'objet d'un mandat d'arrêt en France dans le cadre de l'enquête sur le groupe de Francfort, une des cellules allemandes qui avait projeté plusieurs attentats à Strasbourg (Nord-Est) fin 2000. Quelques jours après l'arrestation de Kadri, un de ses proches, Slimane Khalfaoui, un Franco-Algérien, avait déjà été interpellé à Montfermeil, également en région parisienne. Mirouane Ben Ahmed, dont le nom est aussi apparu dans le dossier sur le groupe de Francfort, a, quant à lui, été placé en garde à vue lundi avec les deux autres suspects – dont l'identité n'a pas été précisée - dans les locaux parisiens de la Direction de la surveillance du territoire (DST). Selon les médias de l'Hexagone, les trois hommes pourraient être liés au réseau Al-Qaïda. Ils seraient même récemment revenus d'un «entraînement» en Tchétchénie. C'est d'ailleurs en remontant cette dernière filière que les services anti-terroristes sont visiblement parvenus jusqu'aux trois suspects. Selon Le Monde de mardi, qui cite des sources policières, un lien a aussi été établi entre cette «cellule de La Courneuve » et un homme clé des réseaux islamistes européens, Abou Doha». Ce chef religieux, aujourd'hui écroué en Angleterre, est considéré, rappelle le quotidien, comme «l'un des organisateurs des envois de volontaires islamistes en Afghanistan et en Tchétchénie». Il est - entre autres - aussi soupçonné d'avoir organisé l'attentat que devait réaliser Ahmed Ressam en 1999 contre l'aéroport de Los Angeles. Cet autre franco-algérien avait cependant été interpellé quelques jours avant, avec 59 kg d'explosifs dans sa voiture... En France, depuis fin novembre, une vingtaine de personnes ont été interpellées dans les milieux islamistes, surtout en banlieue parisienne. A l'approche des fêtes de fin d'année et face au risque sérieux de nouveaux attentats, l'Hexagone a aussi a renforcé son dispositif sécuritaire, le plan «vigipirate». Un millier de militaires et de policiers supplémentaires ont été déployés dans la seule capitale, des centaines d'autres dans les principales villes de province. Avec cette prise conscience effrayante que chaque nouvelle arrestation ne représente qu'un des maillons d'un réseau peut-être plus implanté que les autorités ne le pensaient. «D'autres hommes courent toujours, avec les mêmes intentions opérationnelles» a averti, mardi, un responsable de la DST. Un constat qui n'est pas exclusif à la France.