A l'origine d'une crise avec ses voisins et les Etats-Unis après la découverte de SCUD lui appartenant lundi au large du Yémen, la Corée du Nord a annoncé jeudi la relance de son programme nucléaire. Le monde s'inquiète... S'il est un pays décidé à défier la toute puissance américaine, c'est bien la Corée du Nord. Présentée comme l'un des trois maillons de l'axe du mal identifié en janvier par George W. Bush, Pyongyang aurait pu adopter le profil bas après l'affaire du Sosan. Le navire avait été arraisonné par la marine espagnole lundi dernier au large des côtes du Yémen. Lors de la fouille menée conjointement par les soldats américains et espagnols, quinze missiles SCUD nord-coréens y avaient été découverts! Révélée mardi, l'affaire a été résolue le lendemain lorsque le Yémen a révélé être l'acheteur de cette cargaison - qui devait d'ailleurs lui être restituée d'ici vendredi. Après consultations avec Sanaa sur fond de polémique, Washington a donc fait marche arrière tout en assurant que l'arraisonnement du cargo était légal du point de vue du droit international. Entre le Yémen «son ami et allié» dans la lutte contre le terrorisme, et Washington, l'affaire semblait donc jeudi être entendue, d'autant que Sanaa aurait fait la promesse de ne plus acheter d'armes à la Corée du Nord. Dubitative, la presse espagnole estimait pour sa part jeudi que des explications devaient être fournies à Madrid, réduite à un rôle secondaire par le géant américain. El Mundo estimait même que le ministère espagnol de la Défense était stupéfait d'avoir effectué le «travail ingrat» (l'arraisonnement) avec «le sentiment de ridicule du policier qui arrête un délinquant et voit ensuite comment un juge le laisse sortir par la porte de derrière». Le plus surprenant est cependant venu de Pyongyang. Mercredi, par le biais d'un de ses représentants auprès des Nations-Unis, la Corée du Nord a d'abord qualifié la décision américaine de «grosse erreur». «Il est nécessaire de renforcer la vigilance contre la stratégie d'hégémonie mondiale et la guerre contre le terrorisme américaines » a aussi souligné le même jour le quotidien officiel Rodong Sinmun. « Tous les pays sont appelés à se doter d'une puissance militaire indépendante par eux-mêmes », ajoutait l'éditorial. Dans le collimateur de l'administration Bush qui l'accuse de produire des armes de destruction massive, le pays avait reçu un premier avertissement en août dernier lorsque les Etats-Unis l'avaient sanctionné. Il avait alors vendu des pièces de missiles au même Yémen... Ce qui ne l'a visiblement pas empêché de continuer. Selon la Maison blanche, il est même le premier exportateur actuel de technologie de missiles avec pour clients la Syrie, l'Iran ou encore la Libye. Récemment, la Corée du Nord a pourtant entrepris de normaliser ses relations avec Séoul et Tokyo, par le biais de plusieurs rencontres diplomatiques prometteuses. Mais cette réconciliation historique -qui devait mettre un terme à des années de conflit et effacer la guerre de trois années qui avait débuté en 1950 entre les deux Corée- pourrait être stoppée net. Pyongyang a en effet annoncé jeudi la relance «immédiate» de son programme militaire gelé depuis huit ans. Faisant part de sa «grave préoccupation» sur une possible «montée de la tension dans la péninsule», Séoul a aussitôt réclamé une solution pacifique par le dialogue. Mais le gouvernement nord-coréen a justifié sa décision par sa volonté de produire de l'électricité et compenser la suspension de livraisons de carburant, décidée par les Etats-Unis en novembre après que Pyongyang ait reconnu, selon eux, avoir mené un programme nucléaire parallèle. Depuis 1994, le pays était autorisé à utiliser seulement deux réacteurs nucléaires «non proliférant à eau légère». En échange, le Consortium international, qui rassemble plusieurs pays dont les Etats-Unis et la France, s'était engagé à livrer du fioul au pays... jusqu'au mois dernier. « Le gouvernement de la RDPC (République démocratique et populaire de Corée) n'a pas d'autre choix que de lever le gel qui avait été mis en place à la condition que 500.000 tonnes de carburant soient fournies chaque année» précisait le communiqué du ministère nord-coréen des affaires étrangères de jeudi. Elle va donc «reprendre immédiatement l'activation et la construction des installations nucléaires nécessaires à la production d'électricité». Et le communiqué d'ajouter qu'«il dépend entièrement des Etats-Unis que nous regelions ou non nos installations nucléaires». Ces derniers pourraient-ils faire une seconde marche arrière en moins d'une semaine face à un pays qu'il considère comme aussi dangereux que l'Iran et l'Irak ?