Washington et Madrid ont dévoilé mardi soir l'arraisonnement, la veille, d'un navire transportant quinze missiles SCUD nord-coréens au large du Yémen. Si sa destination est inconnue, Pyongyang et Sanaa sont dans le collimateur. Révélée mardi soir, l'intervention hispano-américaine s'est produite la veille dans le cadre d'une opération contre le terrorisme international. Impliquant deux pays sous haute surveillance, la Corée du Nord accusée de fabriquer des armes de destruction massive et le Yémen, repère du réseau Ben Laden, cette découverte a aussi mené les enquêteurs vers la piste... irakienne. Lequel pays avait justement utilisé des SCUD, ces engins sol-sol de conception soviétique et d'une portée de 100 à 800 km, contre Israël et l'Arabie Saoudite durant la guerre du Golfe en 1991. Rien n'indiquait cependant, mercredi, que le cargo arraisonné se rendait vers l'Irak, selon le département d'Etat américain lui-même. «Un navire marchand a été arrêté par des forces internationales en mer d'Oman. Au cours d'une recherche par une équipe internationale, des SCUD, dont on pense qu'ils proviennent de Corée du Nord, ont été trouvés», a expliqué une porte-parole de la Maison blanche, Amy Black. Lundi, deux frégates espagnoles, en coordination avec les forces américaines, ont intercepté dans l'Océan Indien en face des côtes yéménites le navire transportant quinze SCUD. Du côté du ministère espagnol de la Défense, on précisait mercredi que le cargo avait refusé de stopper les machines et que les Espagnols avaient dû tirer des coups de semonce. Ils ont ensuite envoyé une équipe inspecter le navire censé transporter du ciment. Toujours selon Madrid, le commandant de bord était nord-coréen et des Américains avertis de l'affaire se sont joints à la fouille. Où allait donc ce navire dont on ignore encore la nationalité ? Vers «le Moyen-Orient» a simplement répondu mercredi le ministre espagnol de la défense, Federico Trillo. Vers l'Irak, actuellement sous la menace d'une guerre visant à renverser le régime Saddam Hussein? Le Yémen, touché par l'attentat contre le pétrolier français Limburg, début octobre, et théâtre d'une série d'opérations anti-terrorisme depuis? Considéré comme le berceau du clan Ben Laden, dont le réseau continue de recueillir de larges soutiens auprès des autorités tribales, ce pays constitue certes une zone à risque. Constat que les Américains avaient déjà fait lors de l'attentat contre leur destroyer USS Cole qui avait fait 17 morts en octobre 2000. Faute de preuve sur cette nouvelle affaire, des experts américains ont cependant été mardi envoyés à Sanaa avec l'accord des autorités locales. La chaîne d'informations américaine CNN croyait par contre savoir mercredi que le bateau, baptisé «So San», avait été repéré par les services secrets américains à son départ de Corée du Nord. L'implication de plus en plus sûre de Pyongyang dans cette affaire risque d'ailleurs de détériorer les relations tout juste renaissantes du pays avec son voisin Séoul, le Japon et les Etats-Unis. En janvier dernier, le président Bush avait classé la Corée du Nord aux côtés de l'Iran et de l'Irak parmi l'axe du mal qu'il s'était promis d'éliminer. En août dernier, les Etats-Unis avaient déjà imposé des sanctions symboliques contre une compagnie et le gouvernement nord-coréens pour avoir exporté des pièces de missiles de moyenne et de longue portée. Quelles seront les conséquences de la découverte de lundi ? Pour l'heure, les responsables américains et sud-coréens se consultaient sur les suites à donner à cet «incident».