Dans l'exercice politique, nos dirigeants ne démissionnent pas ou le font très rarement. Leur responsabilité à vie est décrétée de facto depuis belle lurette pour que notre pays batte tous les records du monde de longévité. C'est presque une maladie politique qui s'aggrave parfois quand la responsabilité devient héréditaire. Dans l'exercice politique, nos dirigeants ne démissionnent pas ou le font très rarement. Leur responsabilité à vie est décrétée de facto depuis belle lurette pour que notre pays batte tous les records du monde de longévité. C'est presque une maladie politique qui s'aggrave parfois quand la responsabilité devient héréditaire. C'est pour cela que la démission d'Abderrahmane Youssoufi constitue un évènement majeur dans la vie partisane et politique de notre pays. D'autant plus qu'il s'agit d'un homme d'envergure qui a marqué l'histoire du Maroc depuis l'époque de la résistance en passant par l'opposition farouche et en atterrissant à la primature. Sacré destin d'un gauchiste invétéré qui a dépassé le son de l'option révolutionnaire pour passer, avec une extrême douceur, dans l'espace de la monarchie constitutionnelle. Le pacte signé avec Feu SM Hassan II constitue un retour à la source d'une cohabitation qui rappelle la révolution du Roi et du peuple. Non seulement l'alternance s'est déroulée sans heurt, mais la transition entre deux rois s'est faite avec loyauté, respect et considération. Ce qui n'est pas une sinécure dans un pays qui était menacé par une crise cardiaque selon les dires même du défunt souverain. C'est dire combien la personnalité d‘Abderrahamne Youssoufi a influé positivement dans une double transition successorale et politique. C'est pour cela qu'il faut louer les multiples qualités de cet homme exceptionnel qui a su composer avec une équation complexe : l'alternance. Il ne faut pas oublier que l'ex-Premier ministre s'est aventuré sur un champ miné de toutes parts où tout risquait d'exploser sous ses pieds. La première épreuve de Youssoufi était de convaincre les militants de son parti à adhérer à l'esprit de l'alternance alors qu'il y avait beaucoup d'opposants au choix participationniste. D'un autre côté, il devrait cohabiter avec un Makhzen avec lequel il a partagé beaucoup plus d'animosité que d'amitié. Youssoufi avait ensuite à diriger une équipe gouvernementale hétérogène par la multiplicité et la diversité des partis qui la composaient. Enfin Youssoufi avait à gérer un legs socioéconomique lourd de déficits cumulés depuis quarante ans pour répondre aux attentes de la population. Mission impossible, sauf que l'homme a mis toute l'énergie d'un jeune de 77 ans pour essayer de redresser la barre d'un bateau qui coulait. Incontestablement, le bilan politique de Youssoufi est positif. Ne serait-ce que pour avoir réussi à mener une majorité composite à bon port tout en redorant le blason de notre pays à l'extérieur. Rien que pour cela, l'homme mérite tous les éloges. Le philosophe Mohamed Abed El Jabri n'avait aucunement tort quand il s'est étonné que des projets bloqués au temps de l'alternance soient aujourd'hui approuvés. Mais Youssoufi ne s'est jamais plaint de personne et ne s'est jamais attribué le mérite d'une quelconque décision. On pourrait peut-être lui reprocher d'être parti sans avoir ressoudé son parti l'USFP, miné par de grandes dissensions internes. Mais d'aucuns diront que ce qui se passe dans ce parti aujourd'hui n'a rien d'exceptionnel puisque le volcan USFP qui couve depuis 1959 et qui connaît des irruptions périodiques reste toujours vivant. À l'instar de son parti, Youssoufi restera toujours vivant dans notre mémoire collective par son patriotisme, sa grandeur et sa simplicité.