La première équipe d'experts en désarmement de l'ONU entame sa mission dans un climat de suspicion. Bagdad et Washington s'accusent mutuellement de mauvaise foi. La résolution 1441 est remise en question. La première équipe en désarmement des Nations-Unies est arrivée hier lundi à Bagdad pour entamer une nouvelle mission, dans une ambiance chargée de méfiance et de défiance entre les principaux concernés, l'Irak et les Etats-Unis. Cette avant-garde onusienne est constituée de douze membres de la Commission de Contrôle, de vérification et d'Inspection de l'ONU (COCOVINU) et six de l'Agence internationale de l'Energie atomique (AIEA). Ils se mettront au travail dès demain matin. Au total entre 80 et 100 inspecteurs de la COCOVINU et de l'AIEA seront opérationnels en Irak. Déjà, 33 techniciens préparent sur place depuis une semaine la logistique. Ils ont reçu le week-end vingt tonnes de matériel de télécommunication et d'ordinateurs. Mohamed El-Bradeî, Directeur général de l'AIEA a réaffirmé que les inspecteurs seraient neutres et que les inspections se feront avec objectivité et professionnalisme. Il a rappelé que l'Irak doit présenter le 8 décembre une déclaration attestant qu'il ne possède pas d'armes de destruction massive. «Nous poursuivrons alors les inspections pour nous assurer que cette déclaration est correcte et précise», a-t-il dit. Dans une lettre rendue publique dimanche par le Secrétaire général de l'ONU, l'Irak détaille ses réserves concernant la résolution 1441. Bagdad juge «arbitraires et injustifiées» les vastes prérogatives accordées aux inspecteurs. Il accuse aussi Washington de vouloir exploiter la résolution pour l'agresser. «Il y a une préméditation de s'en prendre à l'Irak sous n'importe quelle justification futile. Le vrai objectif est de créer des prétextes pour provoquer la guerre sous couvert international», écrit M. Naji Sabri, chef de la diplomatie irakienne. De l'autre côté, George Bush a de nouveau averti Saddam Hussein qu'il avait le choix entre garder le pouvoir en se débarrassant de ses armes de destruction massive et garder ses armes au risque de s'annihiler. Cette position intrigue dans la mesure où elle diffère de la revendication affichée par les Américains, qui cherchent plutôt le renversement du régime de Saddam Hussein. Pour débloquer d'éventuelles crises entre les inspecteurs et le gouvernement irakien, un «téléphone rouge» va être établi pour relier en permanence les deux parties. Selon la résolution 1441, l'Irak doit faire «une déclaration à jour, exacte et complète sur tous les aspects de ses programmes de mise au point d'armes chimiques, biologiques et nucléaires, de missiles balistiques et d'autres vecteurs tels que véhicules aériens sans pilotes et systèmes de dispersion». Tout manquement sera considéré comme une nouvelle violation substantielle des obligations de l'Irak et sera signalée au Conseil de Sécurité aux fins d'évaluation», ce qui peut provoquer un recours à la force. Pour Bagdad, ce document repose sur «la présomption de culpabilité de l'Irak» et accorde à la mission onusienne des «prérogatives arbitraires et injustifiées qui visent en réalité à entraver le travail des inspecteurs. L'Irak lance un appel au Conseil de Sécurité et aux pays épris de paix de s'assurer que les inspecteurs vont respecter leur mandat et servir les seuls objectifs des Nations-Unies. En attendant, les Etats-Unis poursuivent leurs préparatifs en vue d'une éventuelle confrontation. Un navire transportant notamment des chars a traversé dimanche le Canal de Suez en direction du Golfe. Cet équipement vient d'Allemagne et devait être acheminé au Koweït. L'armée américaine entasse des armes dans des bases du désert du Koweït et du Qatar. 50.000 soldats et 400 avions sont d'ores et déjà sur place, dans le Golfe.