Le Premier ministre désigné semble faire face à un raidissement de ses interlocuteurs en vue de former son équipe gouvernementale. Les directions politiques sont prises en tenaille entre les mystères de la méthode Jettou et l'impatience de leurs troupes. Les réglages pour trouver le bon dosage entre les politiques et les technocrates suscitent des réserves et des résistances. Report à la dernière minute de la cérémonie d'adieu du gouvernement sortant prévue pour lundi 4 novembre au palais royal d'Agadir. Selon toute vraisemblance, elle devait avoir lieu au même endroit mardi en fin de matinée. On ne sait pas si cette cérémonie sera suivie de la nomination des membres du nouveau gouvernement. Les nouveaux ministres seront-ils reçus le même jour par S.M le Roi ? Rien n'est sûr. En cas de report, cela pourrait, en tout cas, signifier que la nouvelle équipe Jettou n'est pas encore prête et que des réglages sont nécessaires. En effet, l'intéressé a de nouveau repris son bâton de négociateur avec des rencontres avec certains chefs de partis. Décidément, la situation, qui coince quelque part, a du mal à se débloquer. Le malaise est de plus en plus perceptible. Quatre semaines environ sont passées en effet après la désignation du Premier ministre et les noms des heureux ministrables ne sont pas toujours connus. Si quelques-uns ont circulé pendant le week-end dernier, ils relèvent plus du domaine de la rumeur que de l'information. En fait, personne ne connaît la composition exacte de l'exécutif. Encore moins l'identité des futurs collaborateurs de Driss Jettou ainsi que l'architecture du gouvernement. Juste des spéculations et des supputations en l'absence de communication des acteurs concernés à commencer par Driss Jettou. Même les leaders politiques des formations pressenties en furent réduits à attendre la combinaison gagnante que sortira M. Jettou de son chapeau. Celui-ci a eu tout loisir de se rendre compte de la difficulté de former un gouvernement au Maroc. Devant les appétits des uns et les ambitions des autres sur fond de course aux fauteuils, Driss Jettou en a appris des choses. De quoi remplir des carnets sur sa feuille de route devenue celle d'une longue autoroute. Ahmed Osman a non seulement mis son propre nom en tête des ministrables de son parti, mais il a également remis à son interlocuteur un long CV qui retrace par le menu le parcours et les responsabilités qu'il a occupées. Que vaut le jeunisme sans expérience comme dirait l'autre ? Faute de pouvoir faire valoir un ministrable qui soit à la hauteur (en dehors de son fils Ouzzine et l'ombre de son ombre le fidèle Hassan Maâouni), le chef du MNP, Mahjoubi Aherdan, a proposé sa propre candidature. Quel don de soi appréciable. Vive la jeunesse éternelle incarnée par le vieux Amghar. Quant au secrétaire général de l'Istiqlal, il lorgne aux dernières nouvelles sur le portefeuille des Affaires étrangères avant qu'une rumeur ne circule selon laquelle Abbas El Fassi aurait fini par arracher un ministère d'État sans portefeuille. Il semble que Driss Jettou a expliqué à ses interlocuteurs qu'il voudrait former un gouvernement où ne siégent pas les leaders des partis. Sans cette condition, il risquerait de se retrouver avec un cabinet de chefs. L'ex-patron de l'Istiqlal, M'Hamed Boucetta, aurait piqué une crise en apprenant que M. El Fassi a proposé tous les fils des figures istiqlaliennes (le financier Adil Douiri, le gendre de M. El Fassi Nizar Baraka et le Pont et Chaussées Youssef Tazi) excepté son fils, l'architecte Ahmed Khalil qui a reconquis son mandat de député de Marrakech. Or, le concept de la ministrabilité héréditaire est, semble-t-il, mal passé auprès du Premier ministre désigné qui aimerait avoir dans son future équipe la présence de jeunes compétences comme le directeur général de l'ONCF Karim Ghallab qu'il apprécie particulièrement . Peu importe que ce proche de Abdelkrim Ghallab du quotidien Al Alam ne soit pas membre de l'Istiqlal, Driss Jettou aimerait le comptabiliser sur le compte d'un parti politique. La formation de Abbas El Fassi est tout indiquée pour cette petite concession qui ne fera certainement pas plaisir aux jeunes istiqlaliens en mal de consécration ministérielle. Ce qui laisserait croire que le gouvernement Jettou serait un mélange d'hommes politiques et de technocrates apparentés. En plus de Karim Ghallab, on parle de Mohamed Rami, conseiller du Premier ministre qui passe pour être un des meilleurs spécialistes de la question de la pêche au Maroc. Une chose est sûre : le retard pris dans la formation du nouveau gouvernement est annonciateur de grosses surprises.