Le projet de loi de finances adopté par le gouvernement sortant et déposé à la Chambre des représentants serait-il amendé, remplacé ou tout simplement adopté par le nouvel exécutif ? Le projet de loi de finances pour l'exercice 2003 adopté par le conseil des ministres le 9 octobre dernier a été déposé lundi à la Chambre des représentants, selon un communiqué du ministère de l'Economie, des Finances, de la Privatisation et du Tourisme. Un dépôt qui est conforme aux dispositions de la loi définissant la procédure d'adoption de la loi de finances qui précise que ledit projet doit être déposé sur le bureau de l'une des deux Chambres du Parlement, au plus tard, soixante-dix jours avant la fin de l'année budgétaire en cours. Cet acte, pourtant légal, suppose plusieurs questions sur la situation ambiguë créée par la présentation d'un projet de loi de finances par un gouvernement sortant et ses répercussions sur la politique économique et sociale du futur exécutif. Ainsi, l'on se demande actuellement si le prochain gouvernement devra adapter sa politique économique et financière sur la base de la même loi de finances élaborée par son prédécesseur, ou s'il opterait pour la présentation d'une nouvelle loi de finances conformément à son programme. Pour Benyounès Merzougui, universitaire et juriste de renom, cette situation présente deux aspects qui nécessitent une réflexion. D'abord, le projet de loi de finances élaboré, adopté et présenté par le gouvernement sortant a été défini sur la base de l'actuelle structure des départements ministériels. Et sachant que le prochain gouvernement connaîtra, sûrement, une restructuration des portefeuilles ministériels, il serait logique de se demander sur la manière dont seront gérés des budgets attribués à un ministère par le projet de loi de finances et qui seront sous la tutelle d'un autre département dans le nouveau gouvernement. "Imaginons par exemple, explique M. Merzougui, que le Secrétariat d'Etat chargé de l'Habitat, actuellement sous la tutelle du ministère de l'Aménagement du territoire, de l'Urbanisme, de l'Habitat et de l'Environnement, soit érigé en ministère autonome ou qu'il soit attaché à un autre ministère, quelle serait, alors sa situation budgétaire ? Comment fera-t-on pour détacher son budget de celui de l'ancien ministère pour l'attribuer au nouveau ?". La restructuration des différents départements ministériels posera donc le problème des attributions budgétaires. Pour éviter ce problème, le nouveau Premier ministre serait amené à préparer un gouvernement "calqué" sur l'ancienne structure. "Dans ce cas, ceux qui ont préparé le projet de loi de finances auront imposé leur structure au nouveau gouvernement", estime-t-il. La deuxième observation faite par M. Merzougui concerne les grandes lignes de la politique économique de l'Etat. "Il faut rappeler que l'actuel projet de loi de finances avait été établi avant le discours de SM le Roi devant le Parlement lors de l'ouverture de la législature, où le Souverain a défini les grandes priorités de la politique économique et sociale qui devrait être adoptée par le prochain gouvernement, à savoir l'emploi productif, le développement économique, l'enseignement utile et l'habitat décent. Or, ces priorités nationales devront être la base de la loi de finances qui sera l'outil de travail du nouveau gouvernement", explique M. Merzougui. Ainsi, il est évident que le futur gouvernement sera tenu sinon de présenter son propre projet de loi de finances, d'apporter des amendements à l'actuel projet pour l'adapter à sa propre politique économique et sociale.