Le régisseur du marché de gros, Aziz Touillila, qui est en même temps 4ème vice-président du conseil de la ville de Casablanca, deux employés du marché et sept mandataires sont poursuivis devant la Cour spéciale de Justice pour détournement de près d'un milliard de centimes. Le dossier des détournements qui s'opéraient depuis des mois, voire des années, au marché de gros de Casablanca arrive enfin devant la justice. Au cours de la semaine passée, le régisseur du marché Aziz Touillila, deux employés du marché et sept mandataires ont comparu devant la cour spéciale de justice. Et vendredi, il a été procédé à l'arrestation du régisseur Aziz Touillila, qui est en même temps quatrième vice-président du conseil de la ville de la capitale économique du pays. L'affaire remonte à juin dernier, lorsque le régisseur a accusé quatorze mandataires de détournement d'une somme de près d'un milliard de centimes. Ces mandataires, qui plaidaient non-coupables, ont dévoilé les circuits de pratiques en noir au marché et ont demandé l'ouverture d'une enquête de la police. Les transactions frauduleuses dans ce marché privent la recette municipale des sommes d'argent faramineuses. Les systèmes de contrôle ne fonctionnent plus, le suivi des transactions sur des registres est suspendu depuis longtemps, le trafic au niveau du pesage est devenu monnaie courante, les fausses déclarations de la marchandise sont toujours de mise. En juin dernier, le régisseur du marché a demandé à quatorze mandataires de restituer à la caisse une somme de près d'un milliard de centimes. Selon le règlement du marché, les mandataires versent chaque jeudi la recette de la semaine. Comment des arriérés pourraient être enregistrés ? Les mandataires accusés indiquent que la somme réclamée ne figure nulle part dans les archives du marché, précisant qu'il ne s'agit que de pratiques de l'administration en vue de les acculer au silence. Dans ce cadre, une réunion avait eu lieu au niveau de la wilaya pour trouver une solution à l'amiable au problème. Sans résultat. Chaque jour des millions de centimes partent en fumée. Chaque jour, plusieurs fausses déclarations sont enregistrées. Par exemple : un camion chargé de poires est enregistré à l'entrée comme rempli de navets blancs. La taxe à verser à la recette est ainsi divisée par plus de dix. Le marché de gros de Casablanca reçoit chaque jour environ 1200 camions chargés de légumes et fruits. Si les fausses déclarations touchent uniquement une centaine de camions, la recette se trouve privée de millions et de millions de centimes. Les pratiques frauduleuses ne se limitent pas uniquement aux fausses déclarations, mais dans certains cas, les transactions s'effectuent sans aucun enregistrement au niveau des circuits du marché. Plusieurs magasins exposent uniquement les échantillons des fruits dont le prix est élevé. Le reste de la marchandise est stocké ailleurs pour échapper aux taxes. Le pire est que les patrons de magasins gèrent d'autres marchés informels en parallèle à Hay Hassani, Lahjajma, Aïn Chock, Bernoussi, Mediouna et Lissasfa. Ces derniers sont devenus de véritables petits marchés de gros concurrençant déloyalement le premier marché de la métropole. Situé dans la préfecture de Ben M'sik Sidi Othmane, le marché de gros de Casablanca s'étend sur une superficie de cinquante hectares dont vingt sont réservés au frigo. La marchandise est vendue selon deux circuits. Lorsque le conducteur du camion, transportant les marchandises, arrive à la porte principale, il passe par le système de pesage, dépose la carte grise du véhicule, prend son ticket, état de base dans le jargon professionnel, portant le poids de la marchandise, sa valeur totale et la taxe qu'il faut payer et se dirige ensuite soit vers les carreaux, soit devant les magasins. Dans les carreaux, le vendeur verse à la caisse 7 % de la valeur totale de la marchandise, 6 % partent à la communauté urbaine de Casablanca, CUC, et 1 % pour les deux mandataires responsables du carreaux de vente, à raison de 0,5% chacun. Ces derniers, au nombre de quarante, versent chaque jeudi environ quatre-vingts mille dirhams à la communauté urbaine de Casablanca. Dans le cas où les transactions seraient effectuées devant les magasins, le vendeur verse une taxe de 6 % à la caisse et échappe au reste, le 1 % réservé aux mandataires. Il est à souligner que cet espace, environ 250 magasins, 20 carreaux et d'autres infrastructures, qui regorge des activités entre les fellahs et les grossistes, connaît également une abondance de marchands ambulants et autres vendeurs au détail.