Quatorze mandataires sont accusés de détournement d'une somme de près d'un milliard de centimes au marché de gros de Casablanca. Ces mandataires qui plaident non coupables dévoilent les circuits de pratiques en noir et demandent l'ouverture d'une enquête de la police. Les relations entre les mandataires, les propriétaires de magasins et l'administration du marché de gros de Casablanca sont au bras de fer. Les mandataires ne cessent de dénoncer les pratiques en noir des patrons de magasins, avec la complicité de la direction du marché. Les systèmes de contrôle ne fonctionnent plus, le suivi des transactions sur des registres est suspendu depuis longtemps, le trafic au niveau du pesage est devenu monnaie courante, les fausses déclarations de la marchandise sont toujours de mise. Ces pratiques privent la recette municipale des sommes d'argent faramineuses. Dernièrement, le régisseur du marché a demandé à quatorze mandataires de restituer à la caisse une somme d'argent de près d'un milliard de centimes. Selon le règlement du marché, les mandataires versent chaque jeudi la recette de la semaine. Comment des arriérés pourraient être enregistrés? Les mandataires accusés indiquent que la somme réclamée ne figure nulle part dans les archives du marché, précisant qu'il ne s'agit que des pratiques de l'administration en vue de les acculer au silence. Dans ce cadre, une réunion a eu lieu au niveau de la wilaya pour trouver une solution à l'amiable au problème. Les mandataires qui plaident non coupables ont demandé l'ouverture d'une enquête de la police pour « découvrir les vrais circuits de détournement». Chose que l'autre partie a catégoriquement rejetée. « Chaque jour, des millions de centimes partent en fumée. Il y a plus de 60 % de fausses déclarations. Par exemple : un camion chargé de poires est enregistré à l'entrée comme rempli de navets blancs. La taxe à verser à la recette est ainsi divisée par plus de dix. Ce sont les mandataires qui dénoncent ces pratiques», affirme un mandataire qui a préféré garder l'anonymat. Le marché de gros de Casablanca reçoit chaque jour environ 1200 camions chargés de légumes et fruits. Si les fausses déclarations touchent uniquement une centaine de camions, la recette se trouve privée des millions et des millions de centimes. Les pratiques frauduleuses ne se limitent pas uniquement aux fausses déclarations, mais dans certains cas, les transactions s'effectuent sans aucun enregistrement au niveau des circuits du marché. Plusieurs magasins exposent uniquement les échantillons des fruits dont le prix est élevé. Le reste de la marchandise est stocké ailleurs pour échapper aux taxes. Le pire est que les patrons de magasins gèrent d'autres marchés informels en parallèle à Hay Hassani, Lahjajma, Aïn Chock, Bernoussi, Mediouna et Lissasfa. Ces derniers sont devenus de véritables petits marchés de gros concurrençant déloyalement le premier marché de la métropole. Situé dans la préfecture de Ben M'sik Sidi Othmane, le marché de gros de Casablanca s'étend sur une superficie de cinquante hectares, dont vingt sont réservés au frigo. La marchandise est vendue selon deux circuits. Lorsque le conducteur du camion, transportant les marchandises, arrive à la porte principale, il passe par le système de pesage, dépose la carte grise du véhicule, prend son ticket, état de base dans le jargon professionnel, portant le poids de la marchandise, sa valeur totale et la taxe qu'il faut payer et se dirige ensuite soit vers les carreaux ou devant les magasins. Dans les carreaux, le vendeur verse à la caisse 7 % de la valeur totale de la marchandise, 6 % partent à la communauté urbaine de Casablanca, CUC, et 1 % pour les deux mandataires responsables des carreaux de vente, à raison de 0,5% chacun. Ces derniers, au nombre de quarante, versent chaque jeudi environ quatre-vingts mille dirhams à la communauté urbaine de Casablanca. Dans le cas où les transactions seraient effectuées devant les magasins, le vendeur verse une taxe de 6 % à la caisse et échappe au reste, le 1 % réservé aux mandataires. Il est à souligner que cet espace, environs 250 magasins, 20 carreaux et d'autres infrastructures, qui regorgent des activités entre les fellahs et les grossistes, connaît également une abondance des marchands ambulants et d'autres vendeurs au détail.