Entretien avec Ghita Alami, psychologue clinicienne ALM : Les colonies de vacances peuvent représenter une première séparation entre l'enfant et son environnement. Comment vit-il cette rupture ? Ghita Alami : Généralement, le moment du départ en colonies de vacances peut être angoissant. Cela dit, cette anxiété sera déterminée en fonction de l'âge, et du degré d'attachement de l'enfant à sa mère. Il est à préciser dans ce sens que c'est entre l'âge de 6 et 11 ans que l'on est le plus enclin à mal vivre les séparations. Partir en aventure c'est aussi se retrouver dans un nouvel environnement, entouré d'inconnus, loin des copains de classe et de la famille. Il convient donc d'observer le degré de détresse de l'enfant pour le préparer à cette séparation. Ces colonies de vacances ont-elles un effet sur l'autonomie de l'enfant ? Elles sont même considérées comme étant une grande voie d'accès à «l'autonomie». L'enfant aura l'occasion d'apprendre à s'habiller seul, à ranger ses affaires, à se brosser les dents et se laver, notamment grâce aux processus d'imitation. Ce qui lui est très bénéfique. Les colonies de vacances ne sont pas sans influencer de manière positive la mentalité de l'enfant. Il assimile en effet progressivement comment s'intégrer socialement au sein de son entourage et adopte les règles de vie en communauté grâce aux jeux et aux ateliers organisés. Qu'en est-il des frustrations que pourrait rencontrer cet enfant ? Quand il est en colonies de vacances, l'enfant apprend qu'il n'est pas toujours facile de vivre avec l'autre, puisque cela suppose de se plier à des règles qui lui seront imposées, à commencer par le respect de l'autre. S'ajoutent à cela les rencontres avec de jeunes adultes, qui sont autant de nouveaux modèles d'identification possibles pour la construction de sa personnalité. Les diverses activités restent tout de même bénéfiques pour le développement cognitif et psychomoteur de l'enfant. Elles favorisent l'épanouissement psychologique par différents apports. Comme tout endroit, des accidents d'inadvertances ou des chutes dues à l'agitation peuvent survenir. Existe-t-il d'autres risques auxquels les parents doivent être vigilants ? En effet, hormis ce type de situations l'on assiste malheureusement à des cas de noyade ou d'accidents graves que les animateurs ne peuvent pas anticiper à tout moment. S'ajoutent à cela des cas de harcèlements, sexuel ou autre, à l'égard de l'enfant. D'où l'importance d'une éducation solide et d'une sensibilisation de l'enfant aux différents risques que peut comporter son entourage. Conseilleriez-vous tout de même les parents d'envoyer leurs enfants en colonies de vacances ? Chaque parent est en mesure de décider si son enfant est capable de se prendre en main pour quelque temps et gérer ses émotions pendant une certaine période plus ou moins longue. Au niveau des parents, la séparation peut être bénéfique, notamment pour leur vie de couple. Ils peuvent retrouver des moments d'intimité et de proximité qui contribuent à souder la vie familiale. Dans quel état d'esprit l'enfant peut-il revenir des colonies de vacances ? Au retour d'une colonie de vacances, certains enfants parlent peu de ce qu'ils ont fait au cours de leur séjour, cela ne signifie pas pour autant qu'ils ont vécu des choses traumatisantes. Il importe de comprendre que pendant ces vacances votre enfant a noué de nouvelles relations avec ses camarades. Son espace psychique est riche d'émotions, de joies, de petites peines, de relations, et d'expériences. Généralement, la séparation avec les camarades peut être nostalgique pour quelque temps. Le temps lui permettra de faire le deuil de ce qu'il a vécu et retrouver le cours normal de sa vie. Propos recueillis par Raniya El Meknassi (journaliste stagiaire)