Alors que le président Bouteflika entamait hier lundi une visite en Espagne, le Front des forces socialistes a appelé la communauté internationale au secours d'une Algérie livrée à son propre sort. Excepté l'agence de presse officielle algérienne, la presse nationale faisait peu de cas ce lundi de la visite de trois jours du président Bouteflika en Espagne. Une tournée qui entend apporter une «nouvelle ère» aux relations bilatérales entre les deux pays, marquée par la signature mardi d'un «traité d'amitié, de coopération et de bon voisinage» entre le chef d'Etat algérien et le chef du gouvernement espagnol José Maria Aznar. Après une première visite en avril dernier, les deux pays entendaient cette fois-ci renforcer leur vision commune «concernant plusieurs questions internationales, qu'il s'agisse de la lutte contre le terrorisme, du conflit au Proche-Orient, de la question du Sahara ou du dialogue euro-méditerranéen» rapportait l'APS. Et l'agence officielle d'annoncer également la réalisation de plusieurs projets de nature économique, notamment la construction d'un second gazoduc et la pose d'un câble électrique reliant les deux pays. Cette tournée, qualifiée de «stratégique» par Alger, a cependant été largement délaissée au profit de la fin de la campagne électorale et surtout de la situation en Kabylie. La plupart des journaux algériens de lundi revenaient sur un événement majeur: l'appel «urgent» lancé par Hocine Aït Ahmed, leader du Front des forces socialistes (FFS) «aux responsables politiques et militaires algériens, au secrétaire général des Nations Unies, M. Kofi Annan, à la présidente de l'Union européenne, Mme Lene Espersen». Le responsable y fait état de la multiplication des violences politiques et de l'inertie du pouvoir face aux «risques de dérapage en Kabylie». «Le pire est à craindre devant la multiplication des provocations et la montée en puissance du discours et de méthodes fascisantes des partisans du boycott» a écrit Aït Ahmed dans son texte publié par Le Matin. Et d'ajouter que «les élections se tiennent dans un climat de guerre civile que le pouvoir entretient non seulement à travers des milices politiques, mais, aussi, par des groupes aux méthodes fascistes. Cette stratégie de la tension est planifiée par les tenants d'un processus de tchétchénisation de la Kabylie». S'adressant à une communauté internationale muette face à cette situation explosive en Algérie, le leader du FFS a enfin souligné que «la population devait être assurée de votre soutien et de votre solidarité pour éviter un bain de sang». «Il est temps que soit mis fin à la politique de non-assistance à peuple en danger qui dure depuis une décennie car l'impunité ne fait qu'encourager la spirale meurtrière et risque de plonger l'Algérie dans le chaos». Participant au scrutin local de jeudi prochain alors qu'il avait boycotté les législatives du 30 mai, le FFS n'a eu de cesse d'essuyer la colère des Kabyles, contestation qui s'est illustrée par le saccage et l'incendie de ses locaux, par le lynchage et l'intimidation de ses candidats. Silencieuses sur ces exactions quasi quotidiennes, les autorités algériennes ont par contre multiplié les mesures sécuritaires pour freiner le front du boycott et les manifestations prévues durant la campagne. Et le bras de fer continuait encore ce lundi entre manifestants – dont une large majorité de jeunes – et renforts policiers, promettant un scrutin très douloureux jeudi 10 octobre. Ce jour mais aussi la veille, une grève générale sera observée dans toute la Kabylie, où les routes seront aussi barrées. La tension est telle que nul n'ose aujourd'hui se prononcer sur l'issue de ces élections organisées dans un climat insurrectionnel, de terreur islamiste et de lassitude populaire. Des élections de tous les dangers.