Décidés à bloquer le déroulement du scrutin local, les Aârouchs ont défini samedi les suites à donner à leur mouvement jusqu'au jour «J», le 10 octobre, tandis que le FFS continue d'essuyer la colère des Kabyles. Des lendemains incertains. Réunies en conclave ce week-end, les coordinations des Aârouchs, Daïras et Communes (CADC) de Tizi-Ouzou et de Béjaia, les deux principales villes de Kabylie, ont arrêté un dispositif commun pour faire obstacle au scrutin local du 10 octobre. Elles avaient déjà annoncé l'organisation d'une marche de protestation le 5 octobre, date anniversaire des émeutes de 1988, quand les jeunes Algériens étaient pour la première fois descendus dans la rue afin de dénoncer le système du parti unique au pouvoir. Le défilé «souvenir» sera, comme l'ont précisé les deux coordinations, suivi d'une grève générale de deux jours, les 8 et 9 octobre, qui paralysera encore une fois toute la région. Le jour des élections, les axes routiers menant en Kabylie seront par ailleurs bloqués par des barricades dressées par les délégués du mouvement de contestation. Ces derniers ont également décidé d'empêcher l'ouverture des bureaux de vote, de façon à rendre impossible le déroulement du scrutin. De telles mesures de la part des Aârouchs suscitent déjà une grande inquiétude en Kabylie, où la population appréhende un risque d'affrontement annoncé le jour «J». Car, tout en soutenant les revendications kabyles – appliquer toutes les mesures réclamées et rassemblées dans la plate-forme d'El-Kseur -, les candidats du Front des Forces Socialistes restent de leur côté déterminés à participer aux élections, et leurs militants à se rendre aux urnes. Les commentaires de la presse sont à cet égard significatifs : nombreux journaux algériens évoquaient en effet «le pourrissement» de la campagne et la « dangereuse escalade» de la violence. Le FFS, plus que les autres partis, a d'ailleurs lourdement fait les frais de sa décision de participer au scrutin – alors qu'il avait boycotté les législatives de mai dernier. Le secrétaire national à la jeunesse du parti a récemment été victime d'un lynchage à El-Kseur, d'autres candidats ont été contraints d'animer leurs réunions «avec une forte présence policière». Des bureaux ont été saccagés, des militants ont cédé à la pression et se sont retirés de la course. Depuis le « printemps noir» d'avril 2001, une partie de la population kabyle s'est en effet installée dans une situation pré-insurrectionnelle qui menace d'exploser à n'importe quel moment. La population algérienne dans son entier s'est d'ailleurs montrée beaucoup plus préoccupée par son quotidien que par des élections qui, aux yeux d'une grande majorité, sont devenues lassantes et inefficaces. D'autant plus que les programmes politiques présentés par les candidats au renouvellement des communes et wilayas ne semblent pas répondre à leurs préoccupations. Les thèmes sont trop classiques et se rejoignent d'un parti à l'autre sans prendre en compte la proximité de ces élections dont l'issue reste encore très incertaine. A cela se sont régulièrement ajoutées les exactions commises par les groupes islamistes armés, décidés à perturber à leur manière cette nouvelle échéance. Malgré l'intensification des opérations de ratissage par l'armée algérienne, le GSPC et le GIA ont pu multiplier leurs rackets – notamment en installant des faux-barrages sur les axes routiers -, leurs tueries et attentats ces dernières semaines. Les exemples ne manquent d'ailleurs pas : sept personnes ont encore été assassinées dans la nuit de samedi à dimanche à Ammi Moussa, dans la région de Relizane, selon l'agence de presse officielle APS…