Des essaims de criquets pèlerins ont ravagé des exploitations dans les plaines du Souss. Le ministre de l'Intérieur a annoncé une mobilisation impressionnante pour bloquer la progression de criquets immatures, d'une voracité redoutable. Aux grands maux, les grands moyens. Le ministre de l'Intérieur Mostafa El Sahel a annoncé, mardi, une série de mesures pour contrer la progression des criquets, dont des essaims se sont infiltrés dans la région du Souss Massa Drâa. Comme en temps de guerre, la défense concerne le ciel et la terre. Pas moins de 28 aéronefs et hélicoptères sont mobilisés dans le cadre d'un affrètement global portant sur la mise à disposition de 50 avions. Le sol fait également l'objet d'une intense activité avec la mobilisation de 150 véhicules tout terrain, dont 60 sont équipés de systèmes de pulvérisation et d'un parc auto de 380 véhicules. Les munitions ne manquent pas, puisque les équipes impliquées dans la lutte antiacridienne seront dotées de 4,2 millions litres de pesticides. Cette opération nécessitera une enveloppe globale de 430 millions de DH, soit une hausse de 20% par rapport à l'année précédente. Il faut dire que le Maroc est confronté à une nouvelle invasion de criquets pèlerins, venus des pays du Sahel. «Ce sont des criquets immatures, issus de pays où les conditions écologiques ne permettent pas toujours de trouver des végétaux», indique à ALM Saïd Ghaout, directeur du Centre national de lutte antiacridienne marocain (sous la tutelle du ministère de l'Intérieur), basé à Agadir. Chassés par des terres ingrates, les criquets ont jeté leur dévolu sur le poumon de l'agriculture marocaine. Là où sont concentrés plus des deux tiers de la production nationale de légumes et plus de la moitié de la production d'agrumes. Selon Tarik Kabbaj, maire d'Agadir et opérateur agricole, les premiers essaims de criquets ont fait leur apparition, samedi après-midi dernier, à Taroudant. «Ils ont touché plusieurs exploitations, mais leur nombre s'est considérablement accru le dimanche 24 octobre». A telle enseigne que les vagues de criquets ont interposé un écran entre la population et le soleil. Ils ont rembruni le ciel, éveillant de vieilles angoisses relatives à l'un des insectes parmi les plus dévastateurs de la nourriture de l'Hommes. Les acridiens ont envahi deux zones. Ils ont ravagé 10.000 hectares à Oulad Tayma et 5.000 ha à Lahmar-Taroudant. «Je me suis rendu sur place et j'ai pu constater que les clémentiniers ont été complètement effeuillés», précise le maire d'Agadir. Les oliviers ont également pâti de la présence des acridiens. Mais, selon le directeur du Centre national de lutte antiacridienne marocain, un arbre a été plus sollicité que les autres : le cyprès. «Les criquets y passent la nuit», précise M. Ghaout. Interrogé sur le mystère du goût des acridiens pour les cyprès, M. Ghaout répond: «Les criquets ont des préférences». Par ailleurs, les criquets qui ont envahi la région du Souss Massa Drâa sont d'autant redoutables qu'ils sont jeunes. Leur voracité n'en est que plus grande. Un essaim de criquets jeunes, couvrant une surface de 100 ha, vient aisément à bout de 100 tonnes de produits végétaux par jour. Ces criquets peuvent se grégariser à la faveur de certaines conditions climatiques. Et les dernières pluies présentent des conditions d'humidité favorables aux pontes. D'ailleurs, la menace des acridiens est à prendre au sérieux. La vague de criquets qui a touché la région du Souss Massa Drâa sera suivie par d'autres. «Nous allons continuer de recevoir des essaims de criquets pendant les mois à venir», indique M. Ghaout. A rappeler que la campagne antiacridienne 2003-2004 a coûté 350 millions de DH à l'Etat. Une surface s'étendant sur 2.832.000 hectares a été traitée jusqu'au mois d'août 2004. La campagne a nécessité une mobilisation de plusieurs départements : Forces royales air, gendarmerie royale, ministère de l'Intérieur, ministère de l'Agriculture, Protection civile. Un PC coordonne les efforts de ces intervenants. Il est basé au groupement aérien de la Gendarmerie royale à Rabat et porte le nom de Poste central de coordination de la lutte anti-acridienne (PCCLA). Jusque-là, il a réussi à contenir la progression des acridiens.