Le criquet menace de dévaster la nourriture des Marocains. Avec l'éclosion de nouveaux essaims d'une voracité redoutable, le danger est plus persistant que jamais. La FAO et même le Centre de coordination marocain reconnaissent la recrudescence de la menace. Le criquet menace la sécurité alimentaire du Maroc. Ce n'est pas un cri alarmiste, et encore moins une inclination à jouer les oiseaux de malheur. La menace est extrêmement sérieuse, réelle. Les efforts déployés par le Maroc ne suffisent plus pour bloquer la progression des criquets. «C'est la plus sérieuse situation acridienne dans la région depuis 10 ans», a averti mardi l'Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture FAO. Les agrumes sont aux premières lignes des denrées en passe de faire les frais de la voracité légendaire du criquet pèlerin. Ces agrumes, que le Maroc exporte vers l'Europe et l'Amérique du Nord, sont d'une valeur estimée à 400 millions de dollars. La situation est d'autant inquiétante que les pontes, éclosions et formation de bandes larvaires ont débuté au mois d'avril dans la vallée de Draâ. Les criquets qui sortent de ces bandes larvaires sont d'autant plus redoutables que leur voracité dépasse au moins cinq fois celle des criquets adultes. Un essaim de criquets, couvrant une surface de 100 ha, vient aisément à bout de 100 tonnes de produits végétaux par jour. Les acridiens ne laissent rien derrière eux. Les criquets disséminent, selon une expression consacrée, “le fertile et l'ingrat“. Ils dévorent les tiges des végétaux jusqu'à la base. Le poste central de coordination de la lutte anti-acridienne (PCCLA), basé au groupement aérien de la Gendarmerie royale à Rabat, a réagi à la sonnette d'alarme du FAO par un communiqué publié mercredi. Il précise que le verger agrumicole marocain n'a pas été touché par les essaims de criquets, ainsi que toutes les autres ressources végétales du pays. Néanmoins, contrairement aux précédents communiqués du PCCLA, celui de mercredi est franchement inquiétant. «Les conditions écologiques exceptionnellement favorables consécutives aux pluies exceptionnelles généralisées et importantes qu'a connu la Mauritanie durant la dernière décade du mois d'octobre 2003 ont entraîné une nouvelle multiplication du criquet et l'émergence d'une génération supplémentaire», souligne le communiqué. Le dessèchement de la végétation en Mauritanie a entraîné le déplacement de ces criquets vers le Maroc. L'avancée des criquets vers le Maroc a commencé à la mi-février. «A partir de cette date, la dimension des essaims atteignant le Maroc n'a cessé de s'accroître pour atteindre des superficies quotidiennes infestées de 20.000 ha durant le mois de mars», ajoute le communiqué du PCCLA. La Mauritanie n'est pas le seul pays que les criquets désertent pour les plaines fertiles du Maroc. «Les incursions en provenance de l'Algérie devraient se poursuivre, étant donné que la situation acridienne dans ce pays ne semble pas maîtrisée», indique le communiqué du PCCLA. Ils touchent particulièrement la région de Bouarfa. Le PCCLA précise que le Maroc déploie d'importants moyens pour traiter les surfaces infestées par les criquets. A preuve, les Forces Royales Air, l'Armée de Terre, la Gendarmerie royale, le ministère de l'Agriculture, de l'Intérieur et de la Santé sont mobilisés contre les acridiens. Ils disposent de 42 avions, dont 2 gros porteurs (C 130) et 7 hélicoptères. Le Maroc a déjà mobilisé une enveloppe financière de plus 170 millions de DH pour traiter quelque 908.283 hectares. Cette somme demeure toutefois insuffisante. La FAO précise qu'il faut 17 millions de dollars supplémentaires pour rendre efficace la lutte contre les acridiens.