Les cultures agricoles au Maroc sont en danger. La gravité de la situation est due à l'importance de la zone géographique concernée et à l'insuffisance des moyens mobilisés pour traiter les milliers d'hectares occupés par les acridiens. Des chiffres pour rassurer. C'est ainsi que se résume la stratégie du Poste central de coordination de la lutte anti-acridienne (PCCLA). Pourtant, loin d'apaiser les inquiétudes, le ton du dernier communiqué du PCCLA porte à croire que la menace des acridiens n'a jamais été aussi sérieuse dans les provinces du sud-est du Royaume. Selon le PCCLA, les infestations par les essaims et les bandes larvaires du criquet pèlerin «ont pris une ampleur exceptionnelle ces derniers jours dans plusieurs régions du pays, notamment à Bouarfa, Oujda, Errachidia, Ouarzazate, Tata et Guelmim». Les concentrations de ces essaims n'ont jamais été aussi denses, et les populations craignent le pire. Le communiqué du PCCLA n'est guère rassurant. Il indique que de «nouvelles et fortes» infestations sont attendues au cours des prochains jours. Notamment en provenance des zones limitrophes au territoire algérien. Chez nos voisins, le ton est franchement catastrophiste. La presse algérienne s'essouffle à tirer la sonnette d'alarme sur la voracité des insectes qui privent les hommes de nourriture. Au Maroc, les récoltes se sont effectuées sans que le butin ne soit partagé avec les acridiens. Mais penser que la menace a été écartée avec la fin des récoltes serait une grave erreur. Les larves ont commencé à éclore, donnant naissance à des effectifs de jeunes criquets d'une voracité redoutable. La loi des superficies traitées, opposée jusque-là par le PCCLA comme ultime argument à l'avancée des acridiens, ne semble plus suffire. Pourtant rien que pendant la semaine allant du 29 juin au 5 juillet, 361.044 hectares ont été traités, portant la superficie totale traitée depuis le début de la campagne à 2.380.000 ha. Par ailleurs, s'il fallait chercher un indice dans la recrudescence de la menace, c'est bien dans l'intensification de la lutte contre les criquets. Ces insectes couvrent chaque jour une superficie de 106.000 ha. Les moyens dont disposent le PCCLA ne suffisent pas à traiter une agglomération d'acridiens qui occupent plus de 100 000 ha. En effet, l'ensemble des aéronefs de traitement nationaux et étrangers au nombre de 28, dont deux gros porteurs C130, permet seulement le traitement quotidien d'une superficie de près de 70.000 ha. En d'autres termes, il existe un déficit de 36 000 ha qu'il faut traiter d'urgence. A ce sujet, l'organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO) a lancé un appel, lundi, pour demander une aide internationale d'urgence aux pays d'Afrique du Nord-Ouest, menacés par les criquets pèlerins. La FAO a souligné, dans un communiqué, que la recrudescence actuelle des criquets pèlerins «est la plus grave depuis la dernière invasion de 1987-89». Elle fait valoir que l'aide internationale supplémentaire est nécessaire d'urgence «afin de compléter les principaux efforts déjà réalisés, et pour empêcher que la situation ne dégénère en invasion». «Une augmentation spectaculaire des criquets pourrait menacer les cultures lors des prochains mois», a ajouté l'organisation. Et justement si le pire a été évité concernant la saison agricole de cette année au Maroc, la menace demeure persistante pour les prochains mois. Aussi est-il indispensable d'y faire face par tous les moyens, maintenant.