Après l'échec de son premier plan, le gouvernement Jettou a mis en place un nouveau programme qu'il veut séduisant destiné à encourager de départs volontaires à la retraite dans la fonction publique. Après le flop de la première tentative, le gouvernement entend renforcer le caractère incitatif de son programme de départ volontaire à l'adresse des fonctionnaires. La réforme se trouve actuellement en cours d'adaptation. Les améliorations envisagées au profit des candidats au départ portent notamment sur l'éligibilité de l'ensemble des catégories des personnels, y compris celles qui sont classées aux échelles 10 de rémunération et supérieures. Aussi, le montant de la prime de départ est porté à 1 mois et demi par année de service. Le plafond des primes allouées aux agents classés aux échelles de rémunération 6 et supérieures est porté à 36 mois. Selon les termes du projet de la loi de Finances 2005, le coût de l'opération, au titre de l'indemnité de départ, pour l'ensemble des effectifs éligibles, soit 73.000 fonctionnaires, est de l'ordre de 16,05 milliards de dirhams. Le dispositif initial mis en place à cet effet, sur la base d'un effectif théorique de 34.000 agents pour un coût total de 3.841 millions DH n'a intéressé que 938 partants, alors qu'on s'attendait à quelque 20.000 partants en 2004. Le projet initial proposait le calcul de la pension de retraite sur la base de 2% du salaire par année d'ancienneté; l'octroi d'une prime de départ égale à un mois de salaire par année de service sans plafond pour les agents classés aux échelles 1 à 5 et avec un plafond de 30 mois pour les agents classés aux échelles 6 à 9. Le constat de départ est, tout de même, édifiant. Personne ne peut contester que la fonction publique marocaine est en sureffectif. Ils sont près de 900 000 fonctionnaires à absorber une masse salariale, en 2004, représentant 12,8% du PIB, soit une charge excessive par rapport à la situation qui prévaut dans les pays à niveau de développement comparable au Maroc. Par contre, on ne peut pas dire que nous en avons assez notamment au regard de leur répartition géographique (9% en Administration centrale au Maroc contre 3 % en France). Mais si notre Administration semble «normalement » dimensionnée en effectifs, la masse salariale apparaît élevée eu égard à la richesse du pays. Maintenant, il s'agit de voir si ces effectifs et les profils des fonctionnaires sont adaptés aux nouveaux défis de l'Administration dans le giron de la mondialisation et les perspectives d'ouverture du Maroc. Comment provoquer le changement au sein de cette fonction publique de carrière qui souffre de lourdeurs et de dysfonctionnements dont les pouvoirs publics et les citoyens sont bien conscients ? C'est Mohamed Boussaïd, ministre de la Modernisation des secteurs publics, qui, cette fois, pilote le dossier. Charge à lui donc, de trouver la réponse. La stratégie retenue porte sur une action multiforme, engagée pour une plus grande maîtrise de ces dépenses. Elle consiste principalement à rationaliser l'évolution des effectifs de la fonction publique à travers plusieurs approches. En tête, la poursuite de l'annulation des postes budgétaires libérés par les départs à la retraite, sauf pour certains départements particulièrement sensibles. Ensuite, « la limitation de création d'emplois au strict minimum nécessaire pour répondre aux besoins prioritaires de l'Administration, avec comme corollaire, le renforcement de la mobilité des fonctionnaires à travers la simplification des conditions de redéploiement du personnel, en excédant dans certains départements vers des secteurs insuffisamment pourvus en ressources humaines, que ce soit au sein d'une même administration, entre administrations ou sur le plan spatial», précise la note de présentation du projet de loi de Finances 2005. Toutefois, des contradictions sont à relever. La masse salariale a été lourdement grevée par les répercussions financières des décisions d'amélioration des salaires prises dans le cadre du dialogue social ou en marge de ce dialogue ; la charge additionnelle annuelle consécutive aux décisions prises au cours de la période 1996-2005 se chiffre globalement à 23.461 millions de DH. En plus, le nombre des postes créés dans le projet de loi de Finances s'élève à 7.000 principalement destinés aux départements de l'Education, de la Santé, de la Justice et de l'Intérieur. Par conséquent, la logique de redéploiement n'a toujours pas trouvée sa traduction dans les faits. Reste , toutefois, à espérer que les conditions financières bien meilleures que celles qui sont offertes dans le cadre des départs volontaires au sein des entreprises publiques où, il faut le rappeler, la pension de retraite ne faisait pas partie du package proposé, trouveront preneur. En plus, la nouvelle approche a retenu un échéancier assez strict. La retraite anticipée dans l'Administration sera réalisée, cette fois, en une seule opération et ouverte jusqu'à juin 2005. Par contre, la seule certitude, aux dires des experts mondiaux, reste la formation continue et le perfectionnement. C'est le seul instrument à même de contribuer à l'amélioration des qualifications des fonctionnaires, d'autant que la fonction publique se vide des agents subalternes pour se repositionner vers une fonction publique d'élites qu'il faudra adapter aux exigences d'un nouveau mode de fonctionnement tourné vers la conception et non l'exécution.