Le gouvernement ne considère pas les ingénieurs agronomes marocains, lauréats des grandes écoles nationales, comme des investisseurs dignes des mêmes avantages que les grands propriétaires terriens. En avril 2004, plusieurs ingénieurs agronomes ont loué des terres appartenant à la Sodea. Une location d'une durée de 18 ans, renouvelable une seule fois, pour 9 ans supplémentaires. Déjà, la durée de location n'est pas la même que pour les investisseurs qui bénéficient de 40 ans renouvelables. Aussi, la Sodea a demandé aux jeunes ingénieurs "de signer des reconnaissances de dettes ainsi que des chèques de garantie en guise de paiement des frais engagés par la Sodea dans les terrains à louer", assure Hassan Elbouchouafi, un des ingénieurs bénéficiaires de ce programme. Cette pratique de la Sodea est complètement illégale. Inutile de rappeler que les chèques garantis sont interdits par la loi. Avant même de signer le contrat de bail, les ingénieurs étaient déjà endettés auprès de la Sodea. Les montants de ces dettes variaient entre 30.000 et 60.000 DH. En fait, par "frais" la Sodea entendait les dépenses en engrais, semis, désherbage, main d'œuvre… Mais le pire restait à venir. En fait, quand les ingénieurs ont vérifié sur place, ils ont découvert que la Sodea n'avait absolument rien dépensé. Trop tard. L'affaire commence à sentir l'arnaque. "Un des ingénieurs a procédé à une expertise judiciaire de son terrain qui n'a pas du tout été semé", souligne Elbouchouafi, qui ajoute que l'ingénieur en question a bien l'intention de porter plainte contre la Sodea. Ce cas n'est pas isolé. Sur une superficie de 44 ha d'oliviers, répartie sur trois ingénieurs, "la production sera nulle cette année", lance Elbouchouafi. Les exemples ne manquent pas. C'est le cas de cette passerelle, louée à un ingénieur, mais qui est occupée par des bidonvilles et quatre familles qui squattent un bâtiment d'habitation. En clair, le gouvernement ne considère pas les cadres qu'il a lui-même formés comme dignes de confiance. Il les enfonce encore plus. Peut-être car ces jeunes diplômés n'ont pas les moyens nécessaires pour faire pression au Parlement, dans les partis politiques et ailleurs.