Mohammed Abed al-Jabri, l'un des philosophes fondateurs de la pensée arabe moderne, s'intéresse dans ses «Positions : témoignages et mises en lumière» à l'histoire contemporaine du Maroc. Il nous la présente avec cette acuité et cette pertinence qui ont fait sa renommée de penseur perspicace. Le jour suivant, le quotidien fournira des détails sur ces dispositions, objet de la bataille de libération économique. Dans l'éditorial, on pourra lire qu'il s'agissait de : - mettre en place un système de contrôle des changes et des transferts des fonds entre le Maroc et la zone du franc français, décision en vertu de laquelle toute personne résidant au Maroc était désormais tenue de fournir le bilan de ses biens, de rapatrier les capitaux investis à l'étranger et les bénéfices réalisés sur ces capitaux; - interdire tout transfert de fonds depuis le Maroc vers la zone du franc, à moins d'une autorisation expresse du Bureau de change, obtenue à cet effet selon les dispositions prévues par la loi; - interdire toute transaction entre les sociétés marocaines et des personnes résidant à l'étranger, à moins d'une autorisation express, obtenue à cet effet selon les dispositions prévues par le système de contrôle des changes et des transferts de fonds; - permettre, à ce sujet les dérogations habituellement en vigueur dans les pays exerçant un contrôle sur les changes : les employés des sociétés étrangères installées au Maroc, ainsi que les étrangers employés dans l'administration ou la fonction publique marocaines, seront autorisés à transférer vers leur pays d'origine une partie du salaire perçu au Maroc. Par ailleurs, et en vertu de la loi marocaine sur les sociétés, sera considérée comme marocaine toute entreprise dont le siège social se trouve au Maroc, même si son capital et ses actionnaires sont étrangers. Une décision royale, notifiée par décret le 26 août 1957, avait maintenu temporairement le statut particulier de la ville de Tanger. Pour rendre le système de contrôle des changes encore plus efficace, un dahir viendra abolir le régime international du port de la ville, le dotant d'un nouveau statut. Abderrahim Bouabid soulignera que le nouveau dahir donnait au chef du gouvernement le droit de contrôle sur les importations, afin de protéger l'industrie locale, et que la ville de Tanger allait, six mois plus tard, être entièrement réintégrée dans l'économie nationale. Parmi les décisions également prises, le gouvernement annoncera une augmentation de 5%- des salaires, avec un gel des prix des produits de base, la mise en application du système de la Sécurité sociale sera également annoncée pour le début 1960. Dans le même cadre, al-Tahrir annoncera, le 23 octobre 1959, que le gouvernement avait adopté, dans le domaine des douanes, d'importantes décisions en faveur de l'industrie locale, accordant la franchise aux matières premières utilisées par cette industrie, et augmentant l'impôt douanier dont sont chargés les produits et marchandises de luxe. • Par Mohammed Abed al-Jabri