Le patron du polisario a adressé mercredi une lettre au secrétaire général de l'ONU pour tenter de disculper Alger du dossier dans le Sahara. Loin d'extraire Alger du conflit, les arguments de Mohamed Abdelaziz l'impliquent davantage. Le polisario a adressé, mercredi 6 octobre, une lettre au secrétaire général de l'ONU sur la question du Sahara marocain. Cette initiative, certainement soufflée par l'Algérie, se veut une réponse au mémorandum, envoyé, il y a quelques semaines, par le Maroc au responsable onusien. Alors que le Royaume a souligné la responsabilité d'Alger dans le conflit du Sahara, le gouvernement algérien a répondu de façon biaisée. Il a désigné le chef du polisaro, Mohamed Abdelaziz, pour riposter au document marocain. Après une suite de détails tenant plus du bavardage que de l'argumentaire, le patron du polisario est enfin allé au vif du sujet : tenter d'extraire le gouvernement algérien d'un dossier où il est mouillé de la plante des pieds jusqu'au cou. Il a commencé par la menace : «Le Gouvernement du Maroc a déclenché récemment une nouvelle escalade, qui si elle ne cesse pas, elle pourra conduire toute la région vers une situation dangereuse dont les conséquences sont imprévisibles». En d'autres termes, montrer du doigt le vrai, le seul, l'unique responsable d'une situation qui perdure depuis 29 ans, constitue en soi une menace pour la stabilité de la région. Comme si cette région n'était pas assez instable du seul fait que l'Algérie héberge plusieurs centaines de mercenaires qu'elle continue à soutenir et à armer. Mohamed Abdelaziz ne se contente pas d'agiter la menace d'un retour aux armes. Dans sa tentative de blanchir Alger, il ne fait, au contraire, que l'enfoncer davantage. Le Maroc chercherait, selon lui, «un bouc émissaire». Rien que ça. Jusque-là, le patron du polisario a formulé des appréciations personnelles sur la non-implication d'Alger dans le dossier. Il fallait autre chose que des jugements de valeur pour laver le soupçon sur Alger. Le chef du polisario l'a trouvé : en tant que pays voisins, l'Algérie et la Mauritanie ont été associés au plan de règlement comme «observateurs». Il ne s'agit pas donc d'une implication, mais d'une observation. En fait, le parallèle établi entre la Mauritanie et l'Algérie est une preuve supplémentaire de l'implication totale et délibérée de l'Algérie dans le conflit du Sahara. Les pièces à conviction ne manquent pas. Elles sont d'autant plus irréfutables qu'elles ont été gracieusement livrées par les responsables algériens. Il y a d'abord l'escalade langagière. Le chef de la diplomatie algérienne a diffusé, le 20 juillet 2004, un communiqué sur les relations bilatérales entre Rabat et Alger où les 2/3 du texte sont consacrés au Sahara. Pour un pays qui se défend d'être partie prenante dans ce conflit, le traitement intense du sujet est pour le moins surprenant. Mieux, le ministre algérien des Affaires étrangères utilise un lexique nouveau : «concernant la question du Sahara occidental, il s'agit d'une question à parachever sur la base du droit international». On retiendra qu'il a utilisé le mot “décolonisation“ pour un territoire que tous les enseignants d'Histoire en Algérie savent qu'il a eu des liens avec le Maroc depuis des temps immémoriaux. Bien plus : la majorité des dynasties qui se sont succédé au Maroc sont originaires de tribus sahraouies. L'allégation de Abdelaziz Belkhadem a été relayée par le président algérien dans une lettre adressée, le 3 août, à Kofi Annan. Abdelaziz Bouteflika s'exprime avec vigueur sur ce sujet tout en prétendant ne pas en être l'ayant droit. Sa lettre est entièrement consacrée au conflit du Sahara. Le bon sens voudrait qu'un pays qui claironne à toute occasion qu'il ne veut pas se substituer au peuple sahraoui, qu'il agit comme un membre des Nations Unies… C'est-à-dire qu'il fasse justement ce qu'il dit : agir justement comme la communauté internationale. Non, Bouteflika méprise l'intelligence des Nations libres, espérant sans doute que sa diplomatie à double langage, rencontrerait l'accueil des dupes. Dans cette même lettre, il a surenchéri dans l'escalade verbale en qualifiant notre pays de «puissance occupante». C'en était trop. Et dans cette entreprise de falsification de l'Histoire volontairement voulue par le gouvernement algérien, le chef du gouvernement, Ahmed Ouyahia, a déclaré le 10 août, lors d'un dîner offert en l'honneur du patron du polisario : «le peuple sahraoui peut, à juste titre, cultiver avec fierté la mémoire de sa contribution millénaire à l'épanouissement de la civilisation du Maghreb arabe ». C'est à peine s'il n'a pas dit que le polisario est membre fondateur de l'UMA. Au demeurant, il convient d'insister sur le parallèle que le patron du polisario a établi entre Alger et Nouakchott, dans la lettre adressée à Kofi Annan. Est-ce que le président mauritanien fait des sorties impromptues en adressant des messages au secrétaire général de l'ONU ? Est-ce que son gouvernement défend corps et âme le polisario? Est-ce que la Mauritanie héberge, arme, nourrit les polisariens ? C'est cela le rôle d'un pays neutre et observateur. Quant à Alger et à la mièvre lettre qu'elle a dictée à son agent polisarien, elle sait qu'en cas d'escalade, elle ne pourra pas davantage falsifier l'Histoire et mystifier la communauté internationale. Si le spectre d'une guerre venait à se concrétiser, et personne ne le souhaite, les soldats marocains seront prêts à mourir pour défendre leur territoire, parce qu'ils croient en leur cause. Il est très peu probable que les Algériens en fassent autant pour une parcelle de terre qui ne leur appartient pas.