«Le fruit bonbon de l'hiver !» C'est en ces termes élogieux que les importateurs canadiens parlent de la clémentine du Maroc. Selon les représentants de l'association québécoise de la distribution des fruits et légumes, le consommateur canadien en raffole. Il n'y a ainsi pas une semaine depuis le début de la commercialisation du produit où le fruit n'est pas en promotion ou en spécial. Pour certaines chaînes de distribution le fruit est même parfois vendu comme produit d'appel pour attirer la clientèle. Il est ainsi très souvent dans les circulaires hebdomadaires des magasin distribuées à des milliers d'exemplaires. C'est dire l'engouement pour l'origine Maroc et sa notoriété. Chez Metro, la porte-parole de la grande surface, Geneviève Grégoire, ne cache pas que l'origine Maroc est la préférée de la chaîne. La représentante avance que la clémentine marocaine constitue 90% des importations du genre de l'entreprise. Voilà qui est fort rassurant pour l'origine Maroc après la piètre campagne d'exportation de l'an dernier en raison d'une cueillette très précoce engendrant une qualité gustative moindre par rapport aux années précédentes. Aujourd'hui, de l'avis d'Alexandre Monette, directeur des ventes chez Courchesne Larose, «la clémentine marocaine a redoré son blason». La saison actuelle s'est en effet distinguée par un regain d'intérêt chez le consommateur final et visiblement c'est le satisfecit chez les importateurs canadiens. Ces derniers disent reconnaître les efforts entrepris par les institutionnels et professionnels marocains pour répondre à leurs attentes. «La principale exigence est surtout en termes de goût et de présentation du fruit», précise Alexandre Monette. Les attributs liés au packaging et au design global du contenant sont en effet suivis de très près. «Les chaînes de distribution ont aussi d'autres impératifs complémentaires en termes de palettisation, d'emballages et de timing», poursuit l'importateur. Pour lui, si la qualité gustative du produit et la présentation en termes de packaging sont maintenues et renforcées, il y a bien des chances pour que la demande se développe. Déjà selon lui, les prémices de développement à court terme se font sentir. A noter que le marché canadien importe annuellement, toutes variétés confondues 57.000 tonnes par an d'agrumes marocains dont 30.000 tonnes de clémentines fines, 12.000 tonnes de Nour et 15.000 tonnes de Nadorcott. Mais ces volumes sont en baisse en cette campagne 2014-2015 compte tenu d'un démarrage tardif des expéditions et de la désaffectation de certains clients du produit Maroc, explique Abdel-Krim Ouguellit, manager du groupement Fresh Fruit. La qualité gustative du produit lors de la campagne 2013-2014, en deçà de l'image du produit Maroc, est particulièrement en cause. Aujourd'hui, la baisse enregistrée en termes de volume est estimée à 30% comparativement aux années précédentes. Un recul qui a profité à l'Espagne et la Californie, explique l'exportateur marocain. La valeur des importations d'agrumes du Canada enregistrées entre 2010 à 2014 montre que la perte de parts de marché est bien plus importante. Selon les chiffres communiqués par Statistiques Canada et le Bureau du recensement des Etats-Unis, la baisse de la valeur des importations de l'origine Maroc a chuté de 33% sur les cinq dernières années. La valeur des importations de l'origine espagnole s'est par contre multipliée par cinq au cours de la même période. Il faut dire que les exportateurs ibériques arrivent à mieux vendre leur produit. Sur le marché du détail canadien, il n'est pas rare de voir les prix de l'origine ibérique bien plus élevés que ceux du produit Maroc alors que de l'avis de consommateurs, l'origine marocaine est de meilleure qualité gustative. Les prix à l'export, bien meilleurs cette année que la saison écoulée, augurent toutefois de bonnes perspectives. Selon les exportateurs marocains, le prix moyen à l'export de la barquette de 2,3 kg de clémentine a atteint 3,80 dollars canadiens. De son côté, la barquette de 1,8 kg a atteint un prix moyen à l'export de 3,50 dollars canadiens, précisent-ils. Sur le marché de détail canadien les prix ont oscillé entre 3,99 et 6,99 dollars canadiens la barquette. Qu'est-ce qui permettrait aujourd'hui dans un contexte visiblement favorable d'aller de l'avant et de reprendre les parts de marchés perdues ? De l'avis de Abderrazak Mouisset, exportateur et président de l'Apefel (Association des producteurs exportateurs de fruits et légumes), ce qui nuit le plus à l'origine Maroc sur ce marché c'est la concurrence maroco-marocaine avec la complicité de certains importateurs. Pour Mouisset, il est plus que grand temps de revoir la stratégie commerciale. Peut-être que la solution serait la mise en place d'une plateforme de commercialisation sur le marché canadien à travers laquelle les exportateurs accorderaient leurs violons et parleraient d'une même voix face à leurs acheteurs. Il y a en tout cas encore des parts de marché à prendre. Par Malika Alami Montréal