Les nominations par S.M le Roi, le 21 juillet 2004, de nouveaux directeurs dans certaines administrations publiques marquent un tournant dans la méthode de sélection des élites. Incontestablement une prime a été donnée cette fois-ci à la promotion interne. De hauts cadres qui ont fait leurs preuves au sein de leur maison-mère se trouvent hissés au sommet de la hiérarchie. Le nouveau patron de l'Administration des Douanes, Abdellatif Zaghnoun, est un gros libre qui vient des Phosphates. L'homme, connu pour sa discrétion et son efficacité , saura faire de cette administration un outil performant au service de l'économie marocaine. Fruit d'une promotion interne méritée à la tête de l'ONCF, Mohamed Rabii Lakhlii, personne rigoureuse et affable, très apprécié des cadres de la maison , faisait déjà office de directeur général de cet établissement, étant donné que son patron réel, Karim Ghallab, est ministre de deux grands départements ministériels. Sur un autre plan, personne ne doute, même ses adversaires politiciens les plus réguliers, des capacités professionnelles d'un haut cadre comme Khalid Alioua. Que les pouvoirs publics souhaitent étoffer le parcours d'un homme politique de valeur en le confrontant à la gestion d'une entreprise publique en cours de redressement comme le CIH est des plus judicieux. C'est comme cela que l'on peut compter, à l'avenir, dans la gestion des affaires du pays sur de vrais hommes d'Etat à l'expérience éprouvée, riche et variée. L'on peut toutefois regretter que cette approche volontariste soit moins systématique que par le passé. Pour les nominations du 21 juillet les propositions ont été faites, comme d'habitude, par le gouvernement sous l'autorité du Premier ministre et les choix finaux ont été opérés sur cette base. Or ce qui a peut-être changé, c'est que les favoris n'ont pas toujours eu gain de cause. Le cas de Abderrazak El Mossadeq est dans ce sens le plus parlant. Ce dernier présentait son retour à la Douane, après avoir quitté le gouvernement, comme un droit acquis et comme si le nécessaire renouvellement de l'élite de l'État ne pouvait le concerner. Il a même pris par voie de presse l'opinion publique à témoin, ce qui, comme bien entendu dans ce genre d'affaire, contrarie les projets que ces amis les plus zélés avaient pour lui. Une nomination n'étant pas le produit d'un rapport de force ou d'une exigence revancharde. Elle est plutôt l'expression à un moment donné de la qualité d'un profil et d'une mission déterminée. Même si dans un passé encore récent un coup de canif a été parfois donné à ce principe sain, les nominations faites par le souverain, le 21 juillet 2004, laissent penser que dans cette matière nous revenons à des procédures plus exigeantes et plus favorables à l'éclosion de nouveaux talents au service de l'État. Il serait malheureux que l'on embarasse le Premier ministre Driss Jettou de questions personnelles concernant le reclassement de tel ou tel ex-poulain alors que toute son énergie doit être consacrée à trouver les cadres irréprochables qui peuvent donner corps à son programme gouvernemental. Le dernier remaniement technique du gouvernement montre à l'évidence par la qualité de certaines recrues que Driss Jettou peut avoir parfois la main très heureuse. Cependant il serait aussi regrettable, la mauvaise foi étant toujours mauvaise conseillère, d'exciper de divergences factices au plus haut sommet de l'État pour faire du cas de Abderrazak El Mossadeq qui était arrivé naturellement, selon son potentiel réel, au terme des missions qui lui ont été confiées, une exception qui ne confirmerait aucune règle.