Récit. Qualifiée «d'appel au meurtre» par l'intéressé, l'enquête publiée lundi par Le Monde démontre à travers quatre témoignages que Jean-Marie Le Pen a patiqué la torture en 1957, en Algérie. «L'eau rentrait dans ma bouche sans s'arrêter, je suffoquais. Mon ventre est devenu énorme. Le Pen s'est mis debout sur moi. L'eau m'est sortie par la bouche et par le nez... Je suis tombé dans les pommes...», raconte Mohamed Abdellaoui. Cet Algérien de 72 ans, présenté par le journal Le Monde comme un militant FLN, a été arrêté par les parachutistes français en février 1957 à Alger. Enfermé à Fort l'Empereur, il avait alors été conduit devant deux hommes qu'il identifie formellement comme le général Paul Aussaresses, récemment condamné en France pour avoir écrit un livre sur la torture, et… Jean-Marie Le Pen. Pourquoi cette enquête ? Le Monde explique qu'elle fait suite à la volonté de quatre victimes du lieutenant Le Pen de témoigner suite au score réalisé par le chef du FN le 21 avril dernier. Dans le numéro de lundi, Abdelkader Ammour, raconte qu'il a été interrogé dans sa maison par Jean-Marie Le Pen et ses hommes, en février 1957. «Ils ont branché les fils électriques directement sur la prise et les ont promenés partout sur mon corps. Je hurlais. Ils ont alors pris l'eau sale des toilettes, m'ont étalé une serpillière sur le visage et me l'ont fait avaler de force. Le Pen était assis sur moi. Il tenait le chiffon pendant qu'un autre versait la flotte. Je l'entends encore qui criait : vas-y, vas-y, t'arrête pas!». Moustapha Merouane affirme que le leader du FN «actionnait l'interrupteur» pendant les séances de torture. «Il a ensuite demandé de l'eau qui m'a été jetée sur le corps, avant de recommencer l'électricité. Je hurlais». Mohamed Amara, enfin, âgé de 18 ans à l'époque, a été arrêté durant la même période avec «un autre de ses frères, Saïd, 24 ans», torturé puis tué. Mohamed Amara raconte que «ses compagnons de cellule ont tous été torturés par Le Pen», à l'électricité, à l'eau et au chalumeau. Selon le quotidien, le chef d'extrême droite était resté trois mois en Algérie de janvier à fin mars 1957. «J'oppose à ces pseudo-témoignages, qui situent ces actions dans des lieux que je n'ai pas fréquentés, un démenti total et formel. Le Pen est un mythe. C'est plus flatteur d'avoir été victime de Le Pen plutôt que d'un inconnu» avait affirmé le 30 mai dernier, le principal intéressé. «Je ne sais pas si ces gens-là ont subi ce qu'ils disent mais en tout cas, ils ne l'ont pas subi de ma part. Ça, c'est sûr. Croyez-moi, honnêtement, cela ne vaut pas un pet de lapin, et en période électorale tout cela est d'un goût douteux» avait-il ajouté. Invité dimanche soir du grand jury RTL-Le Monde-LCI, dans le cadre de la campagne pour les élections législatives, Jean-Marie Le Pen a de nouveau tout nié en bloc. Il a estimé que le journal publiait, «avec la complicité des service secrets algériens», un reportage qui «vise une fois de plus à alimenter les attaques contre l'honneur de l'armée française et des anciens combattants d'Algérie et constitue une apologie indirecte du terrorisme». «Venant après le lynchage médiatique du deuxième tour de l'élection présidentielle, il constitue un véritable appel au meurtre», a-t-il insisté.