Analyse. Une grande majorité de nos concitoyens vivent mal la percée de l'extrême droite en France. Surtout, lorsqu'on est candidat à l'immigration vers l'hexagone. Vu du Maroc, les lendemains du séisme électoral français offrent un spectacle triste et morose. Une grande majorité de nos concitoyens vivent mal la percée «historique» de l'extrême droite française. Cette dernière en effet est conçue comme une force politique qui nourrit pour les pays et les peuples du Maghreb des sentiments hostiles bien réels frôlant souvent le racisme primaire. Les discussions de café et les commentaires de nos organes de presse reflètent -et de bonne manière- l'inquiétude du Marocain moyen qui en dépit des tracasseries administratives, continue de caresser le rêve d'obtenir un visa et pouvoir passer quelques temps sur l'Hexagone. Notre frustration s'explique en premier lieu par notre attachement sentimental aux idéaux réels et supposés- que nous associons à la France. La République en effet, de part notre histoire commune, la complémentarité de nos intérêts économiques et stratégiques, les liens humains et la présence d'une forte communauté marocaine, occupe une place distinguée dans notre conscience nationale. Nos hommes politiques n'ont que des mots tendres pour l'amitié franco-marocaine. Nos hommes d'affaires ont une préférence manifeste pour leurs clients et fournisseurs français, des hommes et des femmes qu'ils pensent bien connaître puisque parlant la même langue. Nos intellectuels ont tendance à puiser les références en matières de démocratie, de droits de l'Homme, des libertés dans le modèle français. Enfin, l'homme de la rue a un faible pour la France, un pays qui lui semble familier et que les prouesses de Zidane rendent plus sympathique. C'est dire que l'Extrême droite française constitue un danger pour notre pays tellement il est lié à la France sentimentalement et matériellement. Notre désarroi s'explique ensuite par notre peur de la banalisation du modèle néo-nazi en Europe.Notre angoisse a pour origine une grande interrogation relative à la possibilité de la reproduction du précédent français dans notre pays. Cette interrogation suppose en effet l'adoption du prisme de la comparaison entre le Front natioanl français et les mouvements islamistes au Maroc (en particulier l‚Adl wa Ihsane). Nous pensons qu‚il est autant insensé qu‚affligeant de comparer entre deux forces politiques qui si elles ont quelques points en commun en matière de discours globalisant (encore faut-il les saisir et les mettre en évidence), ne partagent ni les repères, ni les références, ni les modèles d‚organisations. Les frustrations et les angoisses mises à part, l'expérience française devrait nous renseigner sur plusieurs éléments fondateurs de la démocratie. Primo, il n'existe pas de démocratie complète, seule la participation des citoyens dans la construction continue du bien être collectif est susceptible d'assurer la survie et le bon fonctionnement de la Démocratie. Le triomphe du candidat Le Pen s'explique en partie par le taux élevé des abstentionnistes. Secundo, les sondages sont bien surs indispensables pour la démocratie, mais ils peuvent fausser les jeux et être à l‚origine de catastrophes politiques. Tercio, les « Arabes » de France doivent saisir cette occasion pour organiser leurs rangs et se constituer en Lobby capable d'influer les grands choix de la République. • Hatimi Mohamed